L'ouverture du droit au congé annuel payé : l'assimilation de périodes d'absence du salarié à des périodes de travail effectif
Chaque salarié bénéficie, chaque année, d’un certain nombre de jours de congés qui lui sont rémunérés. C’est le droit à un congé annuel payé. C’est un droit fondamental consacré par les textes internationaux tels que la Déclaration universelle des Droits de l’Homme (article 7), la Convention de l’OIT n°52…
Ce droit a été institué en France par la loi du 20 juin 1936 et a connu une évolution récente avec la loi « Warsmann II » du 22 mars 2012 (n°2012-297).
- L’ouverture du droit à congé payés
A compter du 1er juin 2012, date d’entrée en vigueur de la loi Warsmann II, le droit aux congés annuels payés intervient dès le premier jour de travail. Le salarié n’a plus à justifier avoir travaillé chez le même employeur pendant une durée au moins égale à 10 jours de travail effectif.
« Le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur.» (L.3141-3 du Code du Travail).
Pour bénéficier de son droit aux congés annuels payés, le salarié doit répondre à deux conditions :
- Il doit exercer un travail effectif
- Ce travail doit être effectué chez le même employeur.
La cour de cassation doit régulièrement statuer sur ce qu’il faut entendre par travail effectif et notamment sur le fait d’assimiler à cette notion les périodes d’absences du salarié.
- La prise en compte de période d’absence du salarié comme travail effectif pour l’ouverture du droit à congés payés
Il ne faut pas confondre l'ouverture du droit à congés payés et le calcul du droit à congés payés. En effet, le droit français distingue ces deux notions ; ce qui a pour conséquence une différence d'interprétation du travail effectif lorsqu’il faut déterminer si le salarié a droit aux congés payés ou lorsqu'il faut en fixer la durée.
L'article L.3141-5 du Code du travail prévoit que, pour le calcul de la durée des congés payés, certaines périodes d'absences du salarié peuvent être assimilées à des périodes de travail effectif. C'est le cas des :
- Périodes de congé payé
- Périodes de congé maternité, paternité et d'adoption
- Contreparties obligatoires en repos prévues par l'article L. 3121-11 du présent code et l'article L. 713-9 du code rural et de la pêche maritime
- Jours de repos accordés au titre de l'accord collectif conclu en application de l'article L. 3122-2
- Périodes, dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an, pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle
- Périodes pendant lesquelles un salarié se trouve maintenu ou rappelé au service national à un titre quelconque
Par contre, concernant l'ouverture du droit aux congés payés, le principe est celui de l'absence d'assimilation légale. La cour de cassation a refusé de considérer des périodes d’absences du salarié comme du travail effectif pour l'ouverture du droit à congés (Sociale 11 avril 1991, Sociale 28 octobre 1998).
Il en est de même :
- En cas de rupture anticipée d’un CDD. La période de travail non effectuée ne peut, même en l'absence de faute grave du salarié et même en cas de rupture abusive par l'employeur, donner naissance à un droit aux congés annuels payés (Sociale 7 octobre 1992).
- En cas de grève du salarié. La période où le salarié est en grève ne s’analyse pas comme du travail effectif (Sociale 16 décembre 1981).
- En cas de chômage partiel. Une interruption totale du travail pendant plus d'une semaine ne correspond pas à une période de travail effectif.
Toutefois, dans certains cas, la cour de cassation a estimé que la période d'absence constituait une période de travail effectif.
Lorsqu’un salarié a été dispensé de l’exécution de son préavis, la période de préavis non travaillé devait être considérée comme une période de travail effectif (Sociale 24 novembre 1992).
De plus, la chambre sociale a, récemment, opéré un revirement de jurisprudence (Sociale 3 juillet 2012 n°08-44.834) : « Attendu que les périodes limitées à une durée ininterrompue d'un an pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle entrent en ligne de compte pour l'ouverture du droit à congé régi par l'article L. 3141-3 du code du travail ; que pour l'ouverture du droit au congé annuel payé, l'absence du travailleur pour cause d'accident de trajet doit être assimilée à l'absence pour cause d'accident du travail ».
Elle assimile l'absence du travailleur pour cause d'accident de travail à celle due à un accident de trajet et précise qu'il faut considérer ces périodes comme du travail effectif permettant l'ouverture du droit aux congés payés.
Par cet arrêt, la cour de cassation met fin à sa jurisprudence où elle refusait de prendre en compte les absences liées à un accident du travail ou une maladie professionnelle dans l'ouverture des congés (Sociale 11 mai 2005).
Elle se met en conformité avec un arrêt récent de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE 24 janvier 2012). Cette dernière a précisé que la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 ne fait pas de distinction entre les travailleurs qui sont absents du travail en vertu d'un congé de maladie et ceux qui ont effectivement travaillé au cours de cette période.
Enfin, les conventions ou accords collectifs peuvent prévoir que certaines périodes d'absences, notamment celles qui sont assorties du maintien du salaire, seront assimilées à des périodes de travail effectif pour l'ouverture du droit au congé, aussi bien que pour le calcul de sa durée (Sociale 2 octobre 1997).
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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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