Des pénalités de retard sont fréquemment stipulées dans les contrats. Elles permettent de sanctionner systématiquement le cocontractant du fait de son retard dans l’exécution de son obligation.
L’article L 441-6 al. 12 dispose que « Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire ».
Les parties doivent donc fixer le principe du paiement des intérêts de retard. Si elles n’ont pas fixé le taux applicable, on se référera à celui appliqué par la BCE + 10%.
Quid de l’intervention du juge ? Peut-il intervenir pour diminuer leur montant s’il l’estime abusif, comme il le ferait pour une clause pénale ?
La Cour de cassation a répondu à cette question dans un arrêt du 2 novembre 2011 (Cass. com. 2 novembre 2011 n° 10-14.677 (n° 1072 F-PB), Sté Papeteries de Turckheim c/ Sté Electricité de France).
Dans cette affaire, la société Papeteries de Turckheim faisait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à verser à la société RTE une somme de 1 508 512,19 euros augmentée des intérêts au taux BCE plus 7 points à compter du 25 mai 2009.
Mais selon la demanderesse, les pénalités mises à la charge de l’acheteur en cas de retard de paiement par l’article L 441-6 du code de commerce s’apparentent à une somme due au titre d’une clause pénale et sont en conséquence réductibles par le juge lorsqu’elles présentent un caractère manifestement excessif dans le litige qui lui est soumis.
Or en l’espèce, en retenant au contraire que les pénalités réclamées par la société RTE au titre de l’article L 441-6 du code de commerce n’étaient pas susceptibles de modulation par le juge, la Cour d’Appel aurait violé ce dernier texte selon la demanderesse (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, mais transposable à sa rédaction actuelle).
La demanderesse se fonde en outre sur les articles 1152, 1226 et 1229 du Code Civil, relatifs à la clause pénale.
Elle cherche donc bien à ce que la haute juridiction rattache les pénalités de retard aux dispositions régissant la clause pénale et notamment à l’article 1152 qui dispose que « le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ».
Néanmoins la Cour de cassation va rejeter ces prétentions car elle estime qu’après avoir relevé que les dispositions de l’alinéa 6 de l’article L. 441-6 du code de commerce sont des dispositions légales supplétives, c’est exactement que la cour d’appel a jugé que les pénalités dues par application de ce texte ne constituent pas une clause pénale et ne peuvent donc être réduites en raison de leur caractère abusif.
Ainsi, les pénalités dues de plein droit si la facture est payée hors délais ne peuvent pas être réduites par le juge.
Les « pénalités » dues par application de l'article L 441-6, al. 12 du Code de commerce sont donc bien des intérêts de retard.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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