Afin de coordonner avec la logique du plan de cession, le dispositif d’apurement du passif exclut la reprise des dettes de l’entreprise cédant.
D’autre part, les sûretés grevant les biens cédés doivent être effacées par le paiement du prix de cession.
A. Le cessionnaire n'est pas tenu des dettes du cédant
Dans le cadre d’une cession, le cessionnaire acquiert des actifs au moyen d’un prix déterminé. Dès lors, le cessionnaire ne doit assumer uniquement le paiement du prix de cession ainsi que la charge du crédit garanti par un nantissement ou toute forme de sureté immobilière ou mobilière spéciale.
L’article L.661-6 donne la possibilité au cessionnaire de faire appel si le tribunal lui impose des charges non souscrites.
Par conséquent, la jurisprudence a donc déduit qu'il ne saurait être tenu des dettes du cédant accessoirement à la cession d'entreprise (Cass. com., 30 mars 1993).
Dans le cas de la transmission de contrat, seules les dettes afférentes à l’exécution de celui-ci postérieures à la cession peuvent être à sa charge.
Cependant, les inexécutions antérieures ne peuvent lui être imputées. On ne peut lui opposer les motifs imputables au cédant pour lui refuser 'indemnité d'éviction en cas de refus de renouvellement du bail parvenu à son terme (CA Paris, 16e ch., 12 sept. 2005).
Le cessionnaire doit, en revanche, assumer les charges et coûts indissociables de la propriété des actifs cédés. Il peut toutefois former une action en responsabilité contre les organes de la procédure si une charge n’aurait pas été portée à sa connaissance. (Cass. com., 8 janv. 2008, n° 07-10.079)
Enfin, la responsabilité du cessionnaire pourrait être engagée dans le cas où il aurait disposé d’actifs non inclus dans le plan de cession et mis en sa possession par erreur. (CA Bordeaux, 2e ch., 12 déc. 2007).
Selon l’article L.642-2 du Code de commerce, à côté du prix de cession, l’offre de cession peut comportée des engagements financiers destinés à favoriser la poursuite de l’activité.
C’est le cas par exemple des prévisions d’apport en compte courant mis à la charge des cessionnaires associés d’une société à constituer. (Cass. com., 5 févr. 2008, n° 04-19.861).
Ces engagements financiers favorisent forcément la reprise de l’activité. Ils sont sans effet sur les droits des créanciers du cédant.
Si le cessionnaire est engagé à titre personnel à exécuter une obligation distincte de celles du cédant, il ne peut opposer à l’action du créancier l'extinction de sa créance faute de déclaration (Cass. com., 3 janv. 1995, n° 92-22.004).
De même l'administrateur n'assume aucune responsabilité en cas d'inexécution par le cessionnaire de son engagement de paiement d'un passif étranger au plan (CA Pau, 2e ch., 30 oct. 2006).
L’engagement du cessionnaire de payer une dette antérieure doit être considéré comme un engagement supplémentaire et non compris dans le prix de cession.
Il est parfaitement envisageable que le créancier propose un prix de cession minoré en contrepartie d’un abandon de créance. Dès lors, le passif s’éteint et l’engagement réalise une forme de paiement en compensation. (CA Aix-en-Provence, 30 oct. 1997).
Dans le cas où le cessionnaire a perdu les produits de l’activité antérieure à le cession, il doit les restituer à l’organe de la procédure collective. (Cass. com., 5 juill. 2005, n° 04-14.791). Ce sont les accords de « régularisation ».
B.Effets du paiement du prix de cession sur les sûretés réelles grevant les biens transmis
En application de l’article L.642-12, les créanciers hypothécaires et créanciers gagistes ou nantis perdent leur droit de suite et leurs suretés sont purgées à la suite du paiement du prix de cession.
Cependant, tant que le prix de cession n’a pas été intégralement payé, les sûretés grevant les actifs subsistent. Par conséquent, les titulaires conservent leurs droits y afférent. (Cass. com., 4 oct. 2005, n° 04-14.985)
Concernant le droit de suite, celui-ci se trouve paralysé tant que les actifs cédés demeurent dans le patrimoine du cessionnaire.
En cas de cession d'une entreprise mise en redressement judiciaire, le paiement complet du prix n'emporte purge des inscriptions grevant un immeuble que si celui-ci est inclus dans la cession.
En cas d’aliénation du bien cédé, les créanciers recouvrent leur droit de suite.
L’article 642-12 dispose en effet que les créanciers ne recouvrent leur droit de suite qu’en cas d’aliénation des biens acquis. La suspension de ce doit permet de placer les actifs cédés hors d’atteinte des créanciers du cédant du moment qu’ils sont toujours dans le patrimoine du repreneur.
L’article R.642-20 du code de commerce dispose que lorsque l'autorisation d'aliéner est sollicitée, les créanciers titulaires d'un droit de suite en sont avertis par le liquidateur qui informe en même temps le juge-commissaire ou à défaut le président de la juridiction .
Selon l’article L.642-12, la purge des biens transmis de leurs inscriptions est entrainée par le paiement du prix de cession.
Le paiement du prix de cession se doit d’être intégral afin d’opérer la purge des suretés.
Les dispositions relatives à la purge des hypothèques et aux droits des créanciers inscrits sur le fonds de commerce sont sans application.
L’acquéreur des immeubles inclus dans le plan de cession n’a pas l’obligation de procéder aux formalités de la purge des hypothèques.
Cette disposition entraine la perte du droit de surenchérir et de requérir la mise aux enchères de l'immeuble dont le prix de vente leur paraît insuffisant pour les créanciers hypothécaires.
En dépit de l'effet de purge du paiement du prix de cession, la radiation des inscriptions est subordonnée à la décision judiciaire l'ordonnant selon la procédure applicable aussi bien aux réalisations d'actifs isolés qu'à celles comprises dans le plan de cession. (Cass. com., 17 janv. 1995)
Cette saisine du juge d’exécution est une source de retard important mais seule l’inscription subsiste, la sureté est pour sa part éteinte. Par conséquent, rien n’empêche le repreneur ayant acquitté l'intégralité du prix de cession de revendre l'immeuble libre de toute charge. (Cass. com., 17 janv. 1995).
Les dispositions relatives aux droits des créanciers inscrits sur le fond de commerce sont exclues.
Le paiement du prix de cession bloque l’exercice du droit de suite des créanciers inscrits et leur droit de faire opposition au versement du prix. Par conséquent, les articles L.141-14 et L.141-19 du Code de commerce dispose que sont exclues la publicité préalable à l’exercice du droit d’opposition ainsi que la surenchère du sixième du prix de vente en cas de plan de cession.
Le droit de rétention est opposable.
Le droit de rétention ne rentre pas dans le cadre des sûretés réelles sur les meubles. Son opposabilité absolue est un attribut de sa nature de droit réel. (Cass. 1re civ., 24 sept. 2009, n° 08-10.152).
L’article L.622-7 dispose que l'administrateur doit payer le créancier gagiste avec dépossession ou le créancier rétenteur s'il veut retirer un bien gagé ou légitimement retenu.
Relatif à la liquidation judiciaire, l’article L.641-3 autorise le liquidateur à payer le créancier rétenteur pour obtenir la restitution d'un bien pour les besoins de la liquidation judiciaire.
Pour sa part, l’article L. 642-25 prévoit en cas de vente du bien, sur autorisation du juge-commissaire, le report du droit de rétention sur le prix de vente et ouvre au créancier la faculté de demander l'attribution judiciaire avant la réalisation.
Le droit de rétention est opposable aux organes de la procédure et au cessionnaire.
Les dispositions de l'article L. 642-12 n'ont pas d'incidence sur le droit de rétention acquis par un créancier sur des biens compris dans la cession.
L'opposabilité du droit de rétention survit donc à la procédure collective du débiteur et ce, quelle que soit l'issue adoptée par le tribunal.
Il est opposable au cessionnaire dans l'éventualité d'un plan de cession.(Cass. com., 20 mai 1997, n° 95-12.925).
Aucune restriction ne limite l’opposabilité du droit de rétention au cessionnaire.
En effet, compte tenu de son indivisibilité, ce droit subsiste tant que son titulaire n'a pas obtenu le complet paiement des sommes échues et à échoir.
Ce paiement peut, par ailleurs, intervenir par l’exercice du retrait du gage ou de la chose retenue, conformément à l’article L.641-3 du code de commerce.
Les privilèges assortis d'un droit de rétention portant sur des documents, tels celui du commissionnaire ou du voiturier institués par la loi "Gayssot" n° 98-69 du 6 février 1998 (C. com., art. L. 132-2 et L. 133-7), quant à eux, garantissent des créances sans rapport avec le financement du bien sur lequel ils portent sauf à élargir la catégorie des charges de financement pour y inclure les dettes liées aux opérations d'acheminement de la marchandise.
Il est intéressant a noter que le report du droit de rétention sur le prix, incompatible avec la logique de la cession globale, n'est prévu qu'en cas de cession d'éléments d'actif isolés, de sorte que l'opposabilité du droit de rétention au cessionnaire est réduite à une position passive dont la loi au demeurant, n'a toujours pas prévu l’issue.
Nous pouvons donc affirmer que les créanciers munis de sûretés assorties d'un droit de rétention sont en position favorable en cas de plan de cession. En effet, leur droit empêche les inconvénients du paiement résultant de l'affectation de la quote-part du prix de cession au règlement préférentiel de leurs créances.
Ils sont par ailleurs plus nombreux que par le passé.
En outre, ils jouissent de dispositions dérogatoires au principe de la purge automatique afin de garantir le remboursement du crédit ayant servi à acquérir les biens cédés.
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Joan DRAY
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