En matière de cautionnement disproportionné, il appartient à la caution de rapporter la preuve de la consistance de son patrimoine au moment où elle s'est engagée et de la disproportion entre ce patrimoine et la somme garantie au profit du créancier professionnel
Aux termes de l’article L. 341-4 du Code de la consommation :
« un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. ».
En vertu de ces dispositions, le créancier est déchu de ses droits à l’égard de la caution lorsqu’il est prouvé que, lors de l’engagement ou au moment de l’appel en garantie, l’engagement de caution était disproportionné.
Cette disposition pose un principe général de proportionnalité et s’applique que le cautionnement ait été recueilli sous seing privé ou sous la forme authentique, comme c’est le cas en l’espèce.
En cas de disproportion, une jurisprudence constante considère que la caution doit être totalement déchargée (Cass. com, 22 juin 2010, n° 09-67.814 ; CA Paris, 15e ch. B, 25 janvier 2008, n° 06-22322 ; CA Paris, 15e ch. B, 1er juin 2007, n° 05-22456).
Il s’agit là d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui a déjà eu l’occasion de juger que « la disproportion doit être appréciée au regard de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant d'engagements de caution » (Cass. com., 15 janvier 2015, n°13-23.489 ; Cass. com., 22 mai 2013, n°11-24.812).
En l’occurrence, la Cour devra vérifier si l’engagement consenti par la caution était manifestement disproportionné par rapport à ses biens et revenus tant au jour où l’engagement a été consenti qu’au jour où la caution a été actionnée, en passant au crible l’actif de la caution (revenus, placements, résidence principale, valeurs mobilières) et son passif (et notamment les autres cautionnements consentis, que ce soit à la Banque P ou à d’autres établissements de crédit, et les prêts et engagements personnels de la caution).
La disproportion doit s'apprécier en fonction des capacités financières et de la charge de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant d’autres cautionnements bien qu’ils ne correspondent qu’à des dettes éventuelles (Cass. com. 22-5-2013 n° 11-24.812 : RJDA 10/13 n° 839 ). En l'espèce, le gérant s’était porté caution pour chaque concours consenti à la société à hauteur respectivement de 36 000 €, 150 000 €, 72 000 € et 60 000 €, de sorte que son endettement potentiel cumulé était important.
La Cour de Cassation vient de rendre une décision qui précise que
« Doivent être pris en compte pour apprécier la disproportion d’un cautionnement souscrit par une personne physique à l’égard d’une banque les emprunts antérieurs de la caution qu’elle n’a pas déclarés à la banque, si cette dernière en avait nécessairement connaissance. » Cass. com. 8-1-2020 n° 18-19.528 F-D, C. c/ Sté Caisse d’épargne des Hauts-de-France
Dans cette affaire , le gérant d’une société se porte caution solidaire d’un prêt que celle-ci a contracté auprès d’une banque. Poursuivi en exécution de son engagement par la banque, il invoque la disproportion de celui-ci, en se prévalant de quatre prêts professionnels non encore remboursés qu’il avait contractés avec cette même banque avant la conclusion du cautionnement.
Une cour d’appel n’est pas du même avis et considère r que le gérant avait omis de déclarer les prêts lors de l’établissement de la fiche patrimoniale et de la conclusion du contrat de cautionnement, et qu’il avait manqué à son obligation de loyauté envers la banque.
En d’autres termes , la Cour d’Appel considère qu’elle n’était pas tenue de procéder à des investigations sur sa situation personnelle.
La Cour de cassation censure cette décision, reprochant aux juges du fond de ne pas avoir recherché, comme ils y étaient invités, si la banque n’avait pas nécessairement connaissance des prêts litigieux.
Il est de jurisprudence constante que la banque n’est pas tenue de vérifier les biens et revenus, en l’absence d ‘anomalies apparente, ni de vérifier l’exactitude des renseignements qui lui ont été transmis .
Dans certains cas, la banque ne peut bénéficier de cette jurisprudence si elle avait nécessairement connaissance des autres dettes ou charges que la caution ne lui a pas transmis et notamment lorsque c’est la banque qui a accordé les prêts antérieurs à la caution ou si elle avait d’autres engagements solidaires de la caution. (Cass. com. 27-9-2017 no 15-24.726 F-D )
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JOAN DRAY
Avocat
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