Il arrive souvent qu’une personne qui dépose un dossier devant la Commission de surendettement, pour être éligible à une procédure de surendettement ou de rétablissement personnel, soit sous le coup d’une procédure d’expulsion.
Les dispositions sur le surendettement comportent des mesures protectrices pour le débiteur, qui bénéficie, en cas de recevabilité de son dossier, d’une suspension des mesures d’exécution.
Il est nécessaire de déterminer l’incidence de l’ouverture procédure de surendettement sur l’acquisition d’une clause résolution.
Il convient d’articuler les dispositions prévues par la procédure de surendettement avec les dispositions prévues par la loi du 6 juillet 1989.
Les décisions prises par la Commission de surendettement vont impactées la procédure devant le juge des loyers, saisie d’une demande de résiliation.
En pratique, tout dépend de la date à laquelle la commission de surendettement a rendu sa décision.
§ Sur le rôle de la commission de surendettement
L'impact d'une procédure de traitement du surendettement sur la procédure visant à faire constater l'acquisition d'une clause résolutoire dépend en grande partie de la date à laquelle la commission de surendettement a rendu sa décision
Il est admis que la clause résolutoire ne sera paralysée que si la décision de recevabilité du dossier du débiteur par la commission intervient pendant le délai de 2 mois suivant le commandement de payer.
En revanche, la suspension de l'exigibilité des dettes après l'expiration du délai de 2 mois du commandement ne suspend pas les effets de la clause résolutoire (Cass. 3e civ., 22 janv. 2002, n° 99-16.752 : JurisData n° 2002-012666 ; Loyers et copr. 2002, comm. 110. – Cass. 2e civ., 13 juill. 2005, n° 03-18.293 : JurisData n° 2005-029461
Toutefois , la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 sur le crédit à la consommation, applicable depuis le 1er novembre 2010, permet désormais à la commission qui a déclaré le dossier du locataire recevable de saisir le juge du tribunal d'instance aux fins de suspension de la mesure d'expulsion du logement (C. consom., art. L. 722-6).
Selon l'article L. 722-9 du Code de la consommation, "Cette suspension est acquise, pour une période maximale de deux ans et, selon les cas, jusqu'à l'approbation du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 732-1, jusqu'à la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1, jusqu'au jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou jusqu'au jugement d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire".
Mais l'article 118 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, applicable au 1er mars 2019, même aux instances en cours, a modifié l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 dans ses paragraphes VI et VII relatifs à l'impact d'une procédure de surendettement sur la résiliation d'un bail et les délais de paiement qui s'imposent au juge.
Il résulte de ces nouvelles dispositions que lorsqu'un plan conventionnel de redressement a été approuvé et que le locataire a repris le paiement du loyer et des charges, le contenu de ce plan s'impose au juge
Bien évidemment, le débiteur doit veiller à respecter l’échéancier du plan, sous réserve de caducité du plan et de l’exigibilité totale de la dette.
§ Procédure de rétablissement personnel
La procédure de rétablissement personnel permet d’obtenir un effacement total des arriérés de loyers et charges impayés.
Il était acquis que si la clause résolutoire est acquise, le moyen tiré de l'effacement de la dette locative à l'issue d'une procédure de traitement du surendettement est inopérant (Cass. 2e civ., 18 févr. 2016, n° 14-17.782, F-P+B : JurisData n° 2016-002602 ;
L’absence de cohérence entre la procédure de surendettement et la procédure d’expulsion s, à inciter le législateur à rendre plus cohérent et à coordonner les deux procédures.
Depuis la loi Elan du 23 novembre 2018, entrée en vigueur le 1er mars 2019, l'article 24, VIII de la loi de 1989 prévoit que si la commission de surendettement impose un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, le juge des loyers doit suspendre les effets de la clause résolutoire pendant 2 ans, partir de la date de la décision imposant les mesures d'effacement ou du jugement de clôture.
Sous réserve bien sûr que le locataire ait repris le paiement de ses loyers au jour où le juge statue. CA Nîmes, 2e ch. A, 16 déc. 2021, n° 20/00649 : JurisData n° 2021-021447
L'article 24 de la loi, envisage, en fonction des différentes décisions qui ont pu être prises par la commission suite à la recevabilité du dossier de surendettement, leur impact sur le juge saisi d'une demande de résiliation.
Il est désormais acquis que sont privilégiées les décisions prises par la commission de surendettement par rapport à celles prises par le juge du loyer.
En conséquent, le juge judiciaire devra respecter les délais qui ont pu être accordés tant par une mesure de traitement, tant ceux qui ont pu être accordés avant la décision fondée sur l'article 24 que ceux accordés postérieurement.
Le plan de surendettement s'impose au juge des loyers. Des délais de paiement différents sont appliqués au surplus de la dette non envisagée par le plan.
CA Aix-en-Provence, 1re et 2e ch. réunies, 12 sept. 2019, n° 18/20335 : JurisData n° 2019-015485
Si, la commission de surendettement des particuliers impose de nouveaux délais et modalités de paiement de cette dette, ces délais et modalités de paiement se substituent à ceux précédemment accordés, ce qui peut aboutir à dépasser largement le délai de 3 ans maximum prévu par l'article 24.
Ce dispositif protecteur des intérêts du locataire impose la bonne foi du locataire et notamment qu’il ait repris le paiement des loyers.
Ainsi, dès lors qu'un locataire a repris le paiement au jour où le juge statue, il y a lieu d'appliquer la décision prise par une commission de surendettement alors même qu'avant elle la clause résolutoire aurait été déclarée acquise.
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JOAN DRAY
Avocat
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