L’époux commun en bien ayant donné son consentement exprès après s’être porté caution peut voir les biens communs du couple engagés mais pas ses biens propres
« Un créancier professionnel ne peut pas se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à son obligation. » : les article L332-1 et L343-4 du Code de la consommation semble concorder parfaitement avec les faits en l’espèce. Toutefois, les faits sont légèrements différents et font toute la différence.
Le cas des époux commun en bien se portant caution est intéressant. Si l’un des époux se porte caution en remboursement d’un prêt bancaire consenti à une société et que l’épouse de la caution apporte également sa garantie , la caution peut-elle invoquer la disproportion de son engagement ?
Si la réponse est évidente car le cautionnement ne doit pas être disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution. La chambre commerciale de la Cour de Cassation dans un arrêt du 06 juin 2018 répond ici par la négative. (Ccass. Com. 06 juin 2018 n°16-26.182)
La Haute juridiction casse l’arrêt retenu en appel.
En effet, l’article 1415 du Code civil est ici à noter : « Un époux commun en biens qui se porte caution n’engage que ses biens propres et ses revenus ; néanmoins, si l’autre époux a donné son consentement exprès à cet engagement, les biens communs du couple sont également engagés mais pas les biens propres de l’époux consentant »
En l’espèce, un époux marié sous le régime de la communauté se porte caution, son épouse donne son consentement exprès. Mais la caution invoque la classique disproportion de son engagement car poursuivi en exécution de son engagement.
Est retenue en appel cette disproportion au regard de la part de la caution dans les biens communs et non le patrimoine et les revenus du couple.
Censure : cette disproportion du cautionnement doit être apprécié au regard de tous leurs biens et revenus ici, et ce sans avoir à étudier s’il y a le consentement exprès du conjoint de la caution, car il est question ici d’un régime sous la communauté.
De ce fait, sont alors pris en compte les revenus des deux conjoints, ainsi que leurs biens communs.
Ici, était présent le consentement exprès de l’époux de la caution, toutefois cet arrêt va dans le sens de la solution rendue dans l’arrêt du 15 novembre 2017 (Ccass. Com. 15 nov. 2017 n° 16-10.504), époux qui ici n’avait pas donné son consentement exprès et donc les revenus étaient également pris en compte. De ce fait, la disproportion ne pouvait être invoquée.
Elle va donc dans ces cas ne plus retenir le défaut de consentement de l’époux de la caution pour prendre en considération les biens communs et les revenus des époux pour estimer la potentielle disproportion au regard du cautionnement. Elle opère alors un revirement de jurisprudence au regard de l’arrêt du 22 février 2017 (Ccass. Com. 22 fév. 2017 n°15-14.915).
Quant à la situation des époux mariés sous le régime de la séparation de biens, la Cour de cassation va dans le sens inverse :
Elle ne retient que les biens et revenus de l’époux caution. La disproportion de l’engagement d’une caution mariée sous un tel régime ne pourra alors s’étudier qu’au regard de ses biens et revenus à lui seul, quand bien même le conjoint pouvait contribuer largement financièrement au foyer, sous ce régime matrimonial cela n’est pas pris en compte (Ccass. Com. 24 mai 2018 n°16-23.036).
La Cour de Cassation va dans le sens de l’arrêt rendu en 2015 (Ccass. 1eCiv. 25 nov. 2015 n° 14-24.800) qui disait que ne sont pris en compte dans que le patrimoine et les revenus de l’époux caution si les deux époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens.
Il s’agit ici de la séparation de biens prévue à l’article 1536 du Code civil, qui prévoit que les époux sont solidairement responsables uniquement pour l’entretien, les charges du ménage et des enfants, avec toutes les dettes s’y rapportant.
Vous pouvez me poser vos questions sur conseiller juridique.net:
http://www.conseil-juridique.net/joan-dray/avocat-1647.htm
Joan DRAY
Avocat à la Cour
joanadray@gmail.com
76/78 rue Saint-Lazare
75009 PARIS
TEL: 09.54.92.33.53