La répartition des charges en matière de bail commercial
En matière de bail commercial, les charges locatives sont considérées comme des sommes accessoires au loyer principal au même titre que les frais de réparation des locaux.
Les charges locatives sont constituées de l’ensemble des frais nécessaires à l’entretien et au fonctionnement d’un local ou d’un immeuble.
Elles peuvent comprendre les diverses taxes et impôts (taxe foncière, taxe d’ordures ménagères), les charges de copropriété (entretien des parties communes) et tous les frais relevant de la consommation d’énergie (eau, électricité, chauffage).
Tant le Code de commerce et que le Code civil sont muets sur la répartition des charges entre le bailleur et le preneur.
En effet, le statut des baux commerciaux ne comporte aucune disposition relative aux charges récupérables par le bailleur auprès du locataire, il leur incombe donc de « contractualiser leurs obligations en la matière » (CA Paris 17 oct. 1995).
Par conséquent, il appartient au bailleur et au preneur d’en définir les modalités de répartition en vertu du principe de la liberté contractuelle (I).
Ceux-ci devront porter une attention toute particulière à la rédaction des clauses y relatives au risque de se voir imposer une interprétation stricte des dispositions du bail par le juge lors d’un éventuel litige (II).
I/ Principe de la liberté du mode de répartition des charges
Les parties au bail commercial sont libres de déterminer le mode de répartition des charges qui leur convient (CA Paris, 16e ch. B, 3 avr. 1992).
Tout d’abord, la répartition des charges peut être fixée par le règlement intérieur de l’immeuble, même si celui est établi postérieurement au contrat de bail, dès lors que ce dernier l’a expressément prévu (Cass. 3e civ., 24 nov. 2004).
Ensuite, le bailleur et le preneur peuvent s’accorder pour une évaluation forfaitaire des charges qui prendre la forme d’un pourcentage du loyer principal.
Les parties peuvent également convenir d’une évaluation au coût réel des charges.
Les usages et la pratique permettent que certaines charges soient imputables au locataire.
Il s’agit essentiellement des charges liées à l’exploitation, à l’entretien et au fonctionnement de l’immeuble.
Les parties peuvent aussi convenir que le redevable légal des diverses taxes et impôts en répercutera le coût sur son cocontractant, le bailleur pouvant imposer un loyer net de charges à son profit (CA Paris, 12 fév. 1999).
C’est le cas par exemple de l’impôt foncier (Civ. 3e, 8 déc. 1999) ou de la taxe annuelle sur les bureaux (applicable en Ile-de-France) qui sont normalement, en vertu de la loi, imputable au bailleur.
En tout état de cause, le décret n°87-713 du 26 août 1987, qui fournit une liste exhaustive des charges locatives en matière de baux d'habitation, ne peut être appliqué à un bail commercial que si les parties ont prévu de lui soumettre son application.
Ainsi, si le bailleur omet de préciser dans le bail que les charges relatifs au chauffage des locaux sont imputables au preneur, il ne peut par la suite en réclamer le paiement sur la base de ce décret qui n’a vocation à s’appliquer qu’en matière de bail à usage d’habitation (Cass. 3e civ. 3 octobre 2012).
L’absence de disposition légale relative à la répartition des charges en matière de bail commercial doit conduire les parties à être vigilantes lors de la rédaction et de la signature du bail.
Le principe de la liberté contractuelle, si elle permet d’aménager librement par voie conventionnelle le paiement des charges soumet les parties au risque de se voir opposer leur consentement en cas de litige.
De ce fait, la détermination contractuelle des charges locatives peut résulter d'une répartition « équitable » par le biais d’un inventaire contractuel, d'un choix radical (par exemple, tout à la charge du locataire) ou encore d'une référence à un régime locatif légal définissant les charges locatives.
Mais il faut impérativement que le bail contienne un titre détaillé relatif à la répartition des charges sans quoi le juge sera amené à apprécier strictement celle-ci.
II/ Interprétation stricte des clauses du bail par le juge en cas de litige
Le principe de la liberté contractuelle implique que le juge se limite à apprécier les litiges nés de la relation contractuelle en fonction de ce qui a été convenu par les parties lors de la signature du bail.
Le bailleur vigilant prendra soin de détailler la clause relative aux charges de manière suffisamment.
En effet, toute ambiguïté à ce sujet profite nécessairement au preneur (Civ. 3e, 11 janv. 2005).
En matière de répartition des charges locatives, le juge interprète donc strictement la clause et le preneur peut ne pas se voir réclamer le paiement des charges qui ne lui ont pas été expressément transférées par le bail (Cass. 3e civ., 11 janv. 2005).
Ainsi, si de nouvelles taxes sont créées pendant la durée du bail, le bailleur ne pourra faire supporter ces nouvelles charges au preneur que si, et uniquement si l’hypothèse a été visée par une des clauses du bail.
Concernant les actions pouvant être mises en œuvre des suites d’un différend sur le paiement des charges, il faut distinguer selon que l’on se trouve du côté du bailleur ou du preneur.
Le bailleur peut engager une action en paiement des charges locatives.
Le preneur peut engager une action en répétition de l’indu, la répétition étant le droit qui appartient à quelqu'un d'obtenir le remboursement de la valeur dont un autre s'est injustement enrichie à ses dépens.
Initialement, l’action en répétition de l’indu était soumise à la prescription trentenaire ce qui faisait qu’un locataire qui estimait avoir versé injustement certaines charges pouvait, dans un délai de 30 ans, en demander la restitution (Cass. 1ère civ., 1er mars 2005).
Depuis la réforme du droit des prescriptions par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, les actions en paiement des charges locatives ou en répétition de l’indu se prescrivent par cinq ans (art. 2224 du Code civil).
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Joan DRAY
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