Le bail commercial constitue un élément d’actif essentiel pour une entreprise. Son sort dans les procédures collectives suscite de nombreuses questions et fait l’objet d’un contentieux considérable.
Le droit des procédures collectives appréhende le bail commercial pour permettre d’en préserver la valeur en vue du maintien de l’activité de l’entreprise ou de sa réalisation rapide à la faveur du désintéressement des créanciers ou au contraire de mettre fin, dans des conditions dérogatoires, aux créances qu’il génère.
Ainsi, lorsqu'un commerçant fait l'objet d'une procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire), son bail commercial n'est pas résilié automatiquement.
Au contraire, il a vocation à se poursuivre.
Dans le cadre d'un redressement judiciaire, l'administrateur judiciaire dispose d'un droit d'ption pour la continuation ou la résiliation des contrats en cours et notamment le bail commercial.
L'option relative aux contrats en couras a vcation à permettre àl'administrateur de continuer les contrats utiles à la sauvegarde et au redressement de l'entreprise et de résilier ceux qui ne le sont pas.
Dans la pratique, le contrat de bail est souvent poursuivi et parfois même envisagée pour une cession pendant la période d'observation.
Il convient de rappeler que la décision de l'administrateur s'impose au bailleur, qui de son côté, cherchera à obtenir la rupture du contrat en cours,en raion du non paiement du loyer ou des craintes de non-paiement.
1/ La résiliation du bail à l’initiative de l’administrateur :
Si l'administrateur judiciaire peut décider spontanément de la continuation ou de la rupture du contrat en cours, il peut aussi d'abstenir de prendre cette décision et laisser la contrat en cours se poursuivre.
L'administrateur n'a pas toujours les éléments pour exercer l'option que lui réserve la loi.
Cela étant, le bailleur ne peut attendre indéfiniment une réaction de l'administrateur sur le sorte réservé au bail .
Le législateur a offert au bailleur de mettre en demeure l'administrateur de se prononcer sur la maintien du bail en cours .
Cette procédure fera l'objet d'un autre article intilulé " la mise en demeure du bailleur".
Aussi, il n'est envisagé que la résiliation du bail à l'initiative du bailleur, qui estime que le bail ne présente plus aucune utilité pour le preneur.
L’administrateur peut à tout moment décider de « ne pas continuer le bail » (art L622-14 1°C com).
Autrement dit, il peut résilier unilatéralement le bail.
En ce cas, la « résiliation…intervient…au jour où le bailleur est informé de la décision » (art L622-13 I C com).
En conséquence, elle intervient sans aucun préavis, aussitôt qu’il est possible compte tenu simplement de la nécessité d’en informer le bailleur.
Autrement dit, la résiliation du bail résultera de la simple information du bailleur.
Elle devra être faite par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception afin de donner date certaine à la résiliation. La date de la résiliation est donc celle de l'accusé de réception.
En cas de difficulté, il appartient au juge-commissaire saisi sur demande de tout intéressé de constater la résiliation du bail (art R622-13 al 2 C com – art R641-21 al 2). Cette ordonnance est susceptible de recours (Com Cass 7 février 2012 n° 10-26.164 : JurisData n° 2012-001693).
Dès qu’elle prend effet, la résiliation met fin à l’obligation du preneur de verser les loyers.
Mais l’ancien preneur devient ou peut devenir débiteur d’une indemnité d’occupation, tant que se poursuit l’occupation du local.
En cas de résiliation, l'inexécution peut donner lieu à des dommages et intérêts qui doivent être déclarés au passif, le cocontractant pouvant différer la restitution des sommes versées en excédent par le débiteur en exécution du contrat jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les dommages et intérêts.
Lorque l'administrateur opte pour la résiliation du bail, il lui appartient de restituer immédiatement les lieux.
Tout retard peut engager sa responsabilité personnelle.
Enfin, il convient de noter qu’en l’absence d'administrateur, le débiteur peut décider, depuis l’ordonnance de 2008, de la résiliation du bail en application de l'article L. 622-14, 1° du Code de commerce.
De la lettre du texte, il semble que l'avis conforme du mandataire judiciaire doit alors être requis, ce qui est logique eu égard à la gravité de cette décision.
2/ La résiliation du bail à l’initiative du bailleur :
Cette possibilité offerte au bailleur est étroitement encadrée par l’article L622-14 du Code de commerce.
Le bailleur peut obtenir la résiliation du bail dont la continuation a été décidée par l'administrateur.
Cependant, en sauvegarde, comme en redresssement judiciaire, ce droit est limité.
Ainsi, le bailleur peut exercer ou continuer une action en résiliation fondée sur une cause antérieure autre qu’un défaut de paiement du preneur.
S’agissant des causes postérieures de résiliation, le bailleur est plus mal traité qu’un autre cocontractant.
Il faut distinguer le cas où la résiliation est envisagée pour une cause financière , notamment, le défaut de paiement des loyers et des charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture et les autres causes de résiliation.
•résiliation pour loyers et charges impayés postérieurs
Cette situation est délicate car il faut ariculer le droit des procédures collectives avec la droit des baux commerciaux.
Depuis la loi du 10 juin 1994, la bailleur peut obtenir la résiliation du contrat de bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture.
Afin de ne pas pénaliser trop vite l'entreprise-locatire de son local d'exploitation, le législateur a imposé au bailleur un délai d'attente d'avant d'agir en résiliation .
Ce délai est un délai d'action , ce qui signifie que le bailleur doit attendre avant d'introduire une action judiciaire, sous peine d'irrecevabilité de la demande.
En outre, l’action du bailleur à fins de constat ou de prononcé de la résiliation n’est recevable qu’après un délai de 3 mois à compter du jugement d’ouverture (C. com. art. L 622-14, al. 3, L 631-14, al. 1 et L 641-12, 3).
Une dernière restriction résulte de l’article L622-14 al 5, qui interdit au bailleur de fonder l’action en résiliation sur le « défaut d’exploitation pendant la période d’observation» ceci contrairement au droit commun ( art L145-42 du C com).
Mais, la protection ne va pas au-delà de la période d’observations (Civ 3ème 12 juill.2000 n°98-21945).
Il s’agit en effet d’éviter que le propriétaire ne profite d’une interruption momentanée de l’activité pour récupérer le local, compromettant ainsi la sauvegarde.
Le bail est un élément essentiel du fonds de commerce, il est nécessaire à la poursuite de l'exploitation .
Il convient de préciser que si le paiement des sommes dues intervient avant l'expiration de ce délai, il n'ya pas lieu à résiliation.
Si il existe d'autres causes de résiliation du bail postérieures au jugement d'ouverture, il convient de rappeler que le défaut d'exploitation du fonds de commerce pendant la période d'observation ne constitue jamais un motif de résiliation.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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