Le législateur a prévu une procédure spécifique pour la saisie-attribution portant sur un compte bancaire.
La saisie appliquée sur le compte bancaire d’un époux répondra à des règles différentes, selon que les époux sont placés sous le régime de la séparation de biens ou de la communauté.
Le Code des procédures civiles d’exécution a prévu des règles spécifiques encadrant la saisie-attribution lorsqu’elle porte sur un compte bancaire.
La saisie-attribution sur compte bancaire concerne uniquement des créances portant sur des sommes d'argent.
Une décision de justice doit avoir reconnu la créance, l’huissier est alors chargé de dresser l'acte de saisie sur le compte bancaire, qui sera signifié à la banque du débiteur.
Le débiteur doit alors être informé de la saisie-attribution par acte d'huissier dans les 8 jours qui suivent l’acte de saisie, à défaut la procédure est nulle.
Tout comme il est nécessaire de se demande si débiteur saisi est créancier à l'égard du banquier, il convient de se demander si ces sommes n'appartiennent pas en propre à des tiers.
Se pose alors le problème de la saisie-attribution qui être pratiqué sur le compte-joint commun à deux époux.
La solution sera différente selon que la saisie porte sur le compte joint d’un époux séparé ou commun de biens.
I – La saisie du compte joint d'un époux séparé de biens
Lorsque le débiteur est marié sous le régime de la séparation de biens, une difficulté peut apparaitre dans le cas où les époux disposent d'un compte joint.
Aux termes de l'article 1538 du Code civil : « un époux peut prouver par tous les moyens qu'il a la propriété exclusive du bien ».
Ainsi, si l'époux non débiteur parvient à prouver que le compte était alimenté exclusivement par des fonds propres alors il pourra obtenir la mainlevée de saisie.
Peu importe que l'époux débiteur fût en droit de disposer du compte, lorsqu’il pratiquait des paiements, il payait avec les deniers de son conjoint.
En revanche, si le compte était alimenté par les deux époux, ou si l'origine des fonds ne peut être établie, l'article 1583, alinéa 3, pose une présomption selon laquelle : « Les biens sur lesquels aucun des époux ne peut justifier d'une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour moitié ».
Dans ce cas, il s'agit d'un compte indivis et il y a donc lieu à partage.
Autrement dit, les effets de la saisie d'un compte joint par le créancier d'un des époux séparés de biens doivent être limités à la moitié indivise des valeurs déposées à ce compte, faute de preuve qu'elles fussent la propriété de l'époux débiteur (Cass. 2e civ., 10 juill. 1996 : JCP 1997, I, 4008, n° 19).
Le créancier pourrait alors prouver que les sommes portées au compte proviennent de son propre débiteur, mais en pratique cette preuve est très difficile à rapporter.
II – La saisie du compte d'un époux commun en bien
La saisie du compte d'un débiteur marié sous le régime de la communauté conduit à distinguer selon la nature de la dette.
- Les dettes ménagères :
L’article 220 du Code civil prévoit que sont ménagères les dettes : « qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants ».
En vertu de l’article 1414 du même code, elles peuvent être poursuivies sur les biens communs et sur ses biens propres de l'un ou l'autre des époux, y compris leurs gains et salaires.
En conséquence, tous les comptes du débiteur, qu'il en soit seul titulaire ou qu'il s'agisse d'un compte commun, peuvent donc être intégralement saisis.
- Les dettes de la communauté :
En application de l’article 1413 du Code civil, la dette est une dette de communauté, lorsque l'époux qui l'a contractée en répond sur ses biens propres et sur les biens communs.
Le créancier peut donc pratiquer la saisie sur les comptes propres de son débiteur (les comptes alimentés par ses propres revenus), et sur les comptes de communauté (les comptes alimentés conjointement par les époux).
Les comptes seront exclus seulement s’il est prouvé qu'ils sont alimentés exclusivement par les revenus propres de son conjoint, même si le débiteur en est cotitulaire.
Toutefois, l'article R. 162-9 du Code des procédures civiles d'exécution prévoit que si l'un des comptes saisis est alimenté partiellement par les gains et salaires du conjoint, ce dernier a le droit d’exiger, en dépit l'indisponibilité frappant le compte du fait de la saisie, la mise à disposition immédiate d'une somme d'argent à caractère alimentaire.
Le texte offre une option au conjoint qui pourra choisir : « une somme équivalant, à son choix, au montant des gains et salaires versés au cours du mois précédant la saisie ou au montant moyen mensuel des gains et salaires versés dans les douze mois précédant la saisie ».
Le moindre retard dans la mise à disposition de la somme demandée engage la responsabilité de la banque.
Ainsi des dommages-intérêts peuvent être accordés pour un retard de quatre jours dès lors qu’il est démontré un préjudice (Cass. 2e civ., 27 mai 2004, n° 02-13.896).
Par ailleurs, l'article R. 162-4, c'est-à-dire à l'obligation faite au banquier d'informer le créancier saisissant du prélèvement ainsi opéré et de la possibilité pour le créancier de porter une contestation devant le juge de l'exécution.
Enfin, le conjoint de celui qui a formé la demande de mise à disposition qualité à agir devant le juge de l'exécution.
- Les dettes propres :
Lorsque la dette contractée est une dette propre, le débiteur en répond en principe uniquement sur ses biens propres, à l'exclusion des biens communs.
Cette situation correspond à deux hypothèses : les dettes antérieures au mariage ou celles grevant les successions et libéralités échues pendant le mariage et les dettes nées d'un cautionnement ou d'un emprunt sans le consentement exprès du conjoint.
Dans ce cas, la saisie ne pourra aboutir qu'à la double condition que le compte saisi soit alimenté exclusivement par les revenus propres du débiteur et que lesdits revenus ne soient pas devenus des acquêts de communauté.
En revanche, si le compte saisi est alimenté partiellement par des fonds de la communauté ou propres à l'autre conjoint, les fonds propres du débiteur ne peuvent plus être identifiés.
La jurisprudence fait alors peser sur le créancier la charge de la preuve contraire, mais comme il s'agit d'une preuve impossible, cela revient finalement à une règle de fond.
Ainsi, dès lors qu'il n'est pas entièrement alimenté par des fonds propres, le compte échappe intégralement à la saisie (Cass. 1re civ., 17 janv. 2006, n° 02-20.636).
Mais même si le compte est exclusivement alimenté par les revenus propres de l'époux débiteur, il ne faut pas que ceux-ci soient devenus des acquêts de communauté.
La Cour de cassation a ainsi jugé que des salaires versés sur un plan d'épargne-logement perdait leur qualification de biens propres pour devenir des acquêts, échappant par conséquent à l'emprise des créanciers personnels (Cass. 1re civ., 14 janv. 2003, n° 00-16.078).
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Joan DRAY
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