Sous location et recours du propriétaire :
Contrairement aux dispositions de l'article 1717 du Code Civil disposant que la sous-location est possible si le contrat ne l'interdit pas, la sous location est en principe prohibé par l’article L145-31 du Code de commerce pour les baux commerciaux. Mais elle peut être autorisée à certaines conditions.
En pratique, les conditions légales ne sont pas toujours respectées de sorte que la question s’est posée de savoir si le propriétaire pouvait agir contre le sous locataire directement afin de l’expulser.
Aussi, cet article a pour objet de rappeler les conditions à respecter pour que la sous location soit légale avant de voir les recours du propriétaire en cas de sous location irrégulière.
1- Les conditions de la sous location :
La loi entoure l’exception au principe d’interdiction de la sous location de deux garanties.
Ainsi, le bailleur doit, non seulement avoir donné son accord sur le principe d’une sous location mais aussi être appelé à concourir à l’acte.
Il s’agit là de deux garanties distinctes qui se cumulent.
Ainsi, la Cour de cassation a plusieurs reprises jugées que l’autorisation de sous louer ne dispensait pas le locataire d’appeler le propriétaire à concourir à l’acte, que la sous location ait été expressément ou tacitement autorisée (Civ 3ème 19 février 2003 AJDI 2003.348 – Civ 3ème 27 septembre 2006 Bull civ III n° 184).
2- Les recours du propriétaire :
Il convient de rappeler qu’à défaut de remplir les conditions légales, le sous- bail est inopposable au bailleur et le sous-locataire ne peut ultérieurement lui demander directement le renouvellement du sous- bail, sauf si le bailleur a entre temps agréé la sous location.
Néanmoins, le sous -bail irrégulier n’est pas nul dans la mesure où il produit tous ses effets entre le locataire et le sous -locataire dès lors que le bail principal se poursuit (Cass 3ème civ 30 mars 1978 n° 76-14.923).
En conséquence, le bailleur ne peut pas demander la résiliation du sous -bail auquel il n’est pas partie.
En revanche, il peut obtenir selon le cas, la résiliation de plein droit par application d’une clause résolutoire prévue au bail pour ce type d’infraction (Civ 3ème 27 oct 1993, Bull civ III n° 128) ou, en fonction de gravité de l’infraction, le prononcé de sa résiliation judiciaire (Civ 3ème 12 mars 2002 RTS com 2003.277), ou encore la délivrance d’un congé sanction au visa de l’article 145-17 du Code de commerce (Civ 3ème 9 juillet 2003 Bull civ III n° 147).
A cet égard, la Cour de cassation dans un arrêt du 5 janvier 2012 a jugé que l’absence d’agrément du bailleur à la cession du bail en violation de celui-ci ne constituait pas un manquement suffisamment grave pour en justifier la résiliation dès lors que le bailleur avait commis un abus de droit à l’origine du comportement du locataire et du repreneur (Cass 3ème civ 5 janvier 2012 n° 10-20.179 Harmanci c/ Seriouna).
En l’espèce, le bailleur s’était délibérément abstenu de répondre au locataire qui, à de multiples reprises, avait sollicité son accord à la cession du bail et n’avait jamais demandé d’information sur la cession projetée ni opposé de motif sérieux de refus.
En outre, le bailleur peut encore refuser le renouvellement du bail à l'expiration de celui-ci de sorte qu’à l’expiration du bail principal, les droits que le sous locataire tient du locataire s’éteindront avec celui-ci.
Dans un arrêt du 1er février 2012, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur le point de savoir si le bailleur pouvait agir en expulsion du sous locataire alors que le bail principal se poursuivait.
En l’espèce, un bail commercial autorisait le locataire à sous louer partiellement les locaux loués.
Le locataire avait usé de cette faculté sans appeler le bailleur à concourir au sous bail.
Le bailleur avait alors saisi le juge pour qu’il condamne le locataire à faire cesser cette sous -location et qu’il ordonne l’expulsion du sous locataire.
Une Cour d’appel avait ordonné cette expulsion en retenant que le sous -locataire était un occupant sans droit ni titre à l’égard du bailleur.
La cour de cassation a censuré cette décision en rappelant que même si la sous-location n’a pas été faite de façon régulière, cela ne permet pas au propriétaire d’expulser le sous-locataire dans la mesure où le bail principal se poursuivant, la sous location produisait ses effets dans les rapports entre locataire principal et sous locataire (Cass 3ème civ 1er février 2012 n° 10-22.863 Sté Distribution Casino France c/ Maurin).
En effet, le propriétaire est un tiers au bail liant le locataire au sous-locataire, il n’est donc pas partie au contrat de sous-location. Ainsi, il ne peut pas agir directement en vertu d’un contrat qu’il n’a pas signé, selon le principe de l’article 1165 du Code civil.
Un sous-locataire ne peut donc pas être expulsé par une action intentée par le propriétaire directement contre lui. Mais le propriétaire a toujours la possibilité d’agir contre son locataire principal.
En pratique, le propriétaire doit d’abord obtenir la résiliation du bail principal avant de pouvoir demander l’expulsion du locataire qui se maintiendra dans les lieux sans droit ni titre.
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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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