Le transfert du bail d'habitation en cas d'abandon ou de décès du locataire au concubin

Publié le Modifié le 03/07/2015 Vu 8 239 fois 0
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La Cour d'Appel d'Aix-en-Provence a rendu un arrêt le 7 avril 2015, concernant une concubine qui à la suite du départ brusque de son concubin a apporté la preuve qu'elle résidait avec le concubin depuis au moins un an avant la date de départ de celui-ci. Elle souhaitait obtenir le transfert du contrat d'habitation.

La Cour d'Appel d'Aix-en-Provence a rendu un arrêt le 7 avril 2015, concernant une concubine qui à la suite

Le transfert du bail d'habitation en cas d'abandon ou de décès du locataire au concubin

La Cour d'Appel d'Aix-en-Provence a rendu un arrêt le 7 avril 2015, concernant une concubine qui à la suite du départ brusque de son concubin a apporté la preuve qu'elle résidait avec le concubin depuis au moins un an avant la date de départ de celui-ci. Elle souhaitait obtenir le transfert du contrat d'habitation.

  L'article 14 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que le contrat de location est transféré ou continu en cas d'abandon ou de décès du locataire.

Les bénéficiaires mentionnés dans la loi sont:

_ le conjoint ou partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité sans condition,

_ des descendants qui vivaient depuis plus d'un an avec lui,

_ des ascendants, du concubin notoire ou des personnes à charge qui vivaient avec lui depuis plus d'un an.

Il faut, selon cette loi, que le contrat de location soit en cours pour être continué ou transféré.

Le congé donné par le preneur ou le bailleur ou encore par une résiliation intervenue permet de mettre fin au contrat de location à la date du décès ou de l'abandon. Ainsi les occupants ne peuvent prétendre se maintenir dans les lieux (CA de Bordeaux, 5e ch, 22 juin 1989).

Le contrat de location peut être transmis ou continué aux bénéficiaires, si le locataire décède ou abandonne le domicile après avoir reçu congé mais avant la date d'effet de celui-ci (CA de Lyon, 1re ch, 17 avril 2014).

Le congé est opposable aux bénéficiaires de cette loi à la date à laquelle il leur a été donné.

                      Les non bénéficiaires de cette loi

  Les personnes qui ne peuvent se prévaloir de ce contrat de location sont:

_ le concubin du propriétaire décédé qui occupait les lieux avec lui, en l'absence d'un contrat de location à son profit (CA Paris, 14e ch. A, 18 avr. 1984)

_ le conjoint du mari décédé lorsque les parents de ce dernier avaient mis à sa disposition un appartement à titre de convention d'occupation précaire (Cass. 3e civ., 16 avr. 1991).

Lorsqu'un local est loué à des colocataires, en dehors des époux, celui qui reste dans les lieux suite au décès ou à l'abandon de domicile n'a pas besoin de se prévaloir de l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989 puisqu'il a un titre locatif personnel (Cass. 3e civ., 14 nov. 1996).

 Lorsqu'il s'agit des époux colocataires le conjoint survivant a un droit exclusif en cas de décès.

            I. L'abandon et le décès: causes de transfert du bail d'habitation du locataire

                               L'abandon

L'abandon s'entend d'un "départ brusque et imprévisible de l'occupant" sans esprit de retour (Cass. 3e civ 18 mai 1994).

Il appartient au demandeur qui invoque le bénéfice de la continuation ou du transfert du contrat de démontrer que l'abandon présente le caractère requis (Cass. soc, 22 nov 1962).

_ un départ constituant, au vu des éléments versés aux débats, une réorganisation de vie personnelle et professionnelle, un changement de domicile pour convenance personnelle (CA Paris, 6e ch. C, 29 janv. 1992)

_ le départ des lieux du locataire pour des raisons de sécurité à la suite d'actes de violence perpétrés sur lui par sa fille (CA Paris, 6e ch. C, 6 avr. 1994)

_ le fait d'effectuer des voyages réguliers en province (CA Paris, 6e ch. B, 30 mars 2000)

_ ou encore une hospitalisation (CA Paris, 6e ch. B, 6 mai 1991) ou un départ à la retraite (Cass. 3e civ., 16 déc. 1987).

Dans ces cas le contrat se poursuit avec l'obligation pour le locataire de payer les loyers jusqu'à ce qu'il ait été mis fin régulièrement au bail et sans possibilité pour quiconque de revendiquer le bénéfice de la continuation. (Cass. 3e civ., 3 avr. 1997).

L'occupant qui resterait dans les lieux s'y trouverait sans droit ni titre.

      La Cour de cassation a estimé qu'un congé n'était pas incompatible avec la volonté brusque et imprévisible du locataire d'abandonner le logement (Cass. 3e civ., 6 déc. 1995).

Le départ organisé, concerté avec les personnes demeurant dans les lieux, ne peut être considéré comme un abandon et ne peut ouvrir à leur profit le bénéfice des dispositions protectrices de la loi, une telle attitude constituant une cession de fait interdite en principe (CA Paris, 6e ch. B, 29 sept. 2005).

                               Le décès

 Lorsque le logement fait l'objet d'une occupation collective, il n'y a pas de problème de preuve, car les bénéficiaires justifieront du décès du locataire par la production de l'acte de l'état civil.

Dans l'hypothèse où le locataire serait décédé dans un pays éloigné ou à l'occasion d'une situation gravement troublée sans que la preuve formelle de ce décès puisse être établie, cette situation s'analyserait alors en un abandon et ne ferait pas obstacle à la continuation du contrat de location.

                               II. Le bénéficiaire: le concubin notoire

L'article 515-8 dans le Code civil a donné une définition légale du concubinage: "Le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple".

Il faut des relations stables et continues pour que la qualification de concubinage (Cass. 1re civ., 23 févr. 1982, CA Lyon, 2e ch., 27 juin 2000).

                       Absence de dépendance économique du concubin

 Le concubin n'a pas besoin d'être à la charge du locataire pour pouvoir bénéficier de la continuation ou du transfert du contrat.

Il n'a pas à justifier de son besoin de logement ou d'une situation pécuniaire modeste.

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Joan Dray

Avocat à la Cour

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