Troubles de voisinage : nuisance sonore et responsabilité du syndicat de copropriétaire.
Le copropriétaire qui subit une nuisance sonore peut être tenté d’engager la responsabilité du syndicat dès lors que les troubles de voisinage dont il est victime est dû au défaut d’entretien des parties communes ou à un vice de construction.
En effet, le syndicat est susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard des victimes des dommages qui leur seraient causés soit du fait de l’immeuble dont il doit assurer la conservation, soit par la faute de ses préposés ou du syndicat, son représentant légal.
Il convient de préciser que la responsabilité du syndicat du fait de l’immeuble est présumée donc indépendante de toute notion de faute de sa part.
En revanche, il peut engager sa responsabilité en cas de faute commise soit par le syndicat lui-même soit par ses préposés ou son représentant légal, le syndicat à l’ occasion de l’administration de l’immeuble.
Cet article a pour objet de rappeler les différents recours du copropriétaire, victime de troubles de voisinage.
Ainsi, outre, la possibilité d’engager la responsabilité en vertu de la loi du 10 juillet 1965 relative au statut de la copropriété, la victime est en droit d’engager la responsabilité du syndicat sur le fondement du droit commun.
1/ la responsabilité de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 :
L'article 14 alinéas 4 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que le syndicat des copropriétaires « est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d’entretien des parties communes ».
Ce texte est d'ordre public et s'impose à tout syndicat des copropriétaires.
Il suffit pour la victime d’apporter la preuve que son dommage est consécutif à un défaut d’entretien ou à un vice de construction de l’immeuble ou des parties communes, que ces dernières sont affectées par ce défaut d'entretien ou ce vice, pour que la responsabilité du syndicat des copropriétaires soit engagée et qu’à ce titre ce dernier soit condamné à payer des dommages et intérêts pour réparer le dommage (Cass. 3e civ., 14 janv. 1999 : JurisData n° 1999-020061).
En outre, le syndicat des copropriétaires est responsable même s’il ignorait la défectuosité des parties communes.
Ainsi, le syndicat doit répondre du défaut d'étanchéité de la toiture (CA Pau, 19 sept. 2005 : JurisData n° 2005-290447), des désordres causés par un vice de construction ayant affecté l'immeuble dès l'origine (CA Aix en Provence 22 mars 2007 : JurisData n° 2007-337267), des bruits générés par le défaut de conception du système de ventilation des garages (CA Montpellier 16 mai 2006 JurisData n° 2006-317799).
A cet égard, la Cour d’Appel de Versailles dans un arrêt du 3 octobre 2011 qu’en l'absence de défaut d'entretien de la chaudière, ni de vice de construction, la responsabilité du syndicat des copropriétaires ne peut être retenue en raison des nuisances sonores de l'installation dès lors que la gêne auditive est intrinsèque à la construction de l'immeuble.
Dès lors, le copropriétaire victime des nuisances sonores ne peut donc solliciter de quiconque l'allocation de dommages-intérêts et ce d'autant qu'il a changé la disposition des pièces de son appartement en faisant permuter les pièces de réception avec les chambres, si bien que celles-ci sont dorénavant directement situées au-dessus de la chaudière alors qu'elles en étaient primitivement éloignées (CA Versailles, 3 oct. 2011, Pelissolo c/ Synd. 36 rue Peronnet : JurisData n° 2011-021409).
De même, le syndicat est responsable du préjudice résultant de l’inexécution des travaux de remise en état sans possibilité de s’exonérer en déclarant qu’il procédera aux travaux nécessaires et ce même si les travaux ont pris du retard au motif que certains copropriétaires n’ont pas réglé les appels de fonds sauf si le syndicat peut prouver le comportement fautif de ces copropriétaires.
Le syndicat des copropriétaires ne pourra être exonéré qu’en prouvant l’existence de la force majeure, la faute de la victime ou le fait du tiers présentant les caractéristiques de la force majeure.
A cet égard, il convient de préciser que la force majeure est rarement admise.
Ainsi, des précipitations de pluie et de neige non exceptionnelles ne constituent pas un cas de force majeure (CA Toulouse 20 janvier 2000 : JurisData n° 2000-114116).
Le gel ne constitue pas, en principe, un événement imprévisible pour le syndicat (CA Paris 19ème ch 20 février 1996 : JurisData n° 1006-020351).
2/ La responsabilité de droit commun :
Selon l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires pourvoit à la garde de l’immeuble. Il est donc gardien de l’immeuble. Il est gardien de l'immeuble mais également des parties communes et des éléments d'équipement communs (ascenseur, panneau vitré, hall de l'immeuble...).
Comme tout gardien d’une chose, le syndicat des copropriétaires peut voir sa responsabilité engagée si la chose dont il est le gardien cause un dommage sur le fondement de l’article 1384 al 1er du Code civil.
En effet, la cour de cassation a précisé que les dispositions de l'article 14 de la loi de 1965 n'interdisent pas aux victimes de dommages d'invoquer celles de l’article 1384 du Code civil (Cass. 3e civ., 14 janv. 2000 : JurisData n° 2002-016304 - Cass. 3e civ., 19 juin 2007 : Administrer oct. 2007, p. 90).
Par conséquent, chaque fois qu'un dommage est causé par une partie commune ou un élément d'équipement commun placé sous la garde du syndicat, ce dernier en est responsable sur le fondement soit de l'article 14 de la loi de 1965 si la victime apporte la preuve d'un vice de construction ou d'un défaut d'entretien à l'origine du dommage, soit de l'article 1384 si la cause du dommage et inconnue ou incertaine.
Il en résulte que la responsabilité incombant au syndicat pris en sa qualité de « gardien » de l'immeuble apparaît plus étendue que celle tirée de la démonstration d'un défaut de construction ou d'entretien.
Dès lors, les victimes auront souvent avantage à l'invoquer, notamment en cas d'accidents provoqués par des éléments d'équipement commun, par exemple les ascenseurs.
Le syndicat a ainsi été jugé responsable sur le fondement de l’article 1384 du Code civil en raison des dommages causés par le débordement d'eaux dû à une panne des extracteurs ayant entraîné l'arrêt de la Ventilation mécanique contrôlée (Cass 3ème civ 12 juin 1991 : Loyers et copropriété 1991 comm 352) ou en raison des bruits anormaux de la VMC (CA Paris 27 octobre 2005 : Jurisdata n° 2005-288523).
Le syndicat ne sera exonéré qu’en prouvant que le dommage est dû à une cause étrangère revêtant les caractères de la force majeure.
Enfin, le syndicat des copropriétaires comme toute personne juridique peut voir sa responsabilité engagée sur la base de l’article 1382 du code civil.
A cet égard, l’exemple le plus courant est constitué par le trouble de voisinage subi par un voisin à cause de travaux que le syndicat fait réaliser ou a fait réaliser.
Toutefois, il convient de noter que cette action est plus difficile à mettre en œuvre dans la mesure où la victime doit prouver une faute du syndicat des copropriétaires, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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