Dans le cadre d’une liquidation judiciaire, le liquidateur doit poursuivre la réalisation des actifs pour désintéresser les créanciers.
La liquidation judiciaire est une procédure d’exécution destinée à rendre liquides les éléments du patrimoine du débiteur pour assurer le paiement des créanciers ( C. com., art. L. 640-1 ),
C’est le liquidateur qui seul a le pouvoir de procéder à la vente des biens, le débiteur étant lui-même dessaisi.
Lorsque le débiteur a dans son patrimoine des biens immobiliers réalisables, le juge - commissaire peut autoriser leur cession isolée afin de payer les dettes du débiteur.
Le juge - commissaire dispose donc d'un pouvoir d'appréciation important pour permettre une cession dans les meilleures conditions pour le débiteur, et notamment un meilleur prix permettant de mieux désintéresser les créanciers.
L ' article L. 642-18 du Code de commerce a prévu plusieurs modes de vente des immeubles.
Le législateur a confié au juge-commissaire la maîtrise du mode de réalisation des actifs.
Aux termes de l'article L.642-19 du Code de commerce, le juge-commissaire :
- soit ordonne la vente aux enchères publiques ;
- soit autorise, aux prix et conditions qu'il détermine, la vente de gré à gré des autres biens du débiteur lorsqu'elle est de nature à garantir les intérêts de celui-ci
Ils sont en principe vendus selon les modalités de la saisie immobilière ou adjudication amiable ou la vente de gré à gré.
La vente de gré à gré peut se définir comme la possibilité d’un candidat de déposer une offre volontaire auprès du liquidateur judiciaire.
L'auteur de l'offre doit ainsi avoir une volonté ferme de s'engager et à défaut, il pourrait être contraint d'acquérir ou de verser des dommages-intérêts .
Cet article sera consacré aux pouvoirs du juge commissaire dans le cadre d’une vente de gré à gré.
§ Le Juge commissaire détermine la vente
Comme pour toutes les ventes d'actifs du débiteur en liquidation, la vente de gré à gré suppose une ordonnance du juge-commissaire, qui en constitue la première étape.
Il est saisi par le liquidateur. L’autorisation est nécessairement antérieure à la cession. À défaut, la vente est nulle .
L'article L. 642-18 du Code de commerce octroie la faculté au juge-commissaire, « si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions (…) [d'] autoriser la vente de gré à gré aux prix et conditions qu'il détermine ».
L'ordonnance du juge-commissaire constitue une véritable habilitation, non une homologation, ce qui justifie son caractère nécessairement antérieur à la vente.
La vente sans ordonnance préalable du juge-commissaire est atteinte d'une nullité absolue, que tout intéressé peut faire prononcer, sans qu'il ait à justifier d'un grief, peu important que l'autorisation ait été donnée postérieurement .
À peine de nullité de l'ordonnance autorisant la vente d'actifs du débiteur, le juge-commissaire doit entendre le débiteur avant d'autoriser la vente de ses actifs.
Depuis l’ ordonnance du 18 décembre 2008 , la solution commune à toutes les ventes isolées d’actifs du débiteur en liquidation judiciaire est prévue à l’ article R. 642-36-1 du Code de commerce . Le non-respect de cette formalité est une cause de nullité de l'ordonnance
À l'identique de la solution retenue pour la vente par adjudication amiable, le juge-commissaire devra motiver son ordonnance par la considération que la consistance des biens, leur emplacement ou des offres reçues permettent une cession dans de meilleures conditions que la vente sur saisie immobilière.
Le liquidateur devra solliciter du juge-commissaire une ordonnance, qui contiendra le prix et les conditions de la vente ( C. com., art. L. 642-18, al. 3 ).
La vente de gré à gré d'un bien immobilier dépendant de l'actif du débiteur en liquidation judiciaire est parfaite dès l'ordonnance du juge - commissaire , sous condition que celle-ci acquière force de chose jugée.
L'ordonnance autorisant la cession de gré à gré est notifiée à la diligence du greffier, en la forme déterminée par le juge-commissaire, au débiteur et aux créanciers inscrits à domicile élu ( C. com., art. R. 642-36, al. 2 , renvoyant C. com., art. R. 642-23, al. 1 )
Elle se réalise devant un notaire choisi par les parties au prix et conditions fixés par le juge-commissaire.
§ Le juge commissaire ne peut pas modifier les termes de l’offre du candidat
La chambre commerciale considère en effet que « si le juge - commissaire peut autoriser la vente de gré à gré d'un bien immeuble aux prix et conditions qu'il détermine, il ne peut cependant imposer au candidat acquéreur des conditions plus strictes que celles sur lesquelles il s'est engagé aux termes de son offre » (Cass. com., 2 mai 2024, n° 22-14.811).
a Cour de cassation a d’ailleurs déjà jugé que l’acquéreur peut invoquer la condition suspensive dont il a assorti son offre d’achat, peu important que l’ordonnance du juge - commissaire autorisant la vente à son profit ne la mentionne pas expressément (Cass. com., 27 sept. 2016, n° 14-22.372,
§ Le juge commissaire doit choisir le plus offrant
La cession des actifs est une simple "vente" de biens, meubles ou immeubles.
Il y a donc un bien et un prix, et le seul objectif est le paiement des créanciers. Ainsi a priori le juge commissaire se détermine en faveur du plus offrant en terme de prix, après vérification de sa solvabilité c'est à dire de son aptitude à payer le prix proposé.
Le juge -commissaire ne peut imposer au candidat repreneur des conditions plus strictes que celles sur lesquelles il s'est engagé aux termes de son offre.
La Cour d’Appel de LYON a précisé dans un arrêt récent : « qu’une cession d'actifs est une simple vente de biens, meubles ou immeubles, et le prix qui est fixé ou retenu a pour seul objectif le paiement des créanciers, étant indiqué que le juge se détermine en faveur du plus offrant en termes de prix après vérification de sa solvabilité. Il ne s'agit pas d'une cession d'entreprise qui mène à apprécier le projet d'entreprise présenté par le repreneur ».
CA Lyon, 17 oct. 2024, n° 24/03002 : JurisData n° 2024-018860
Cela signifie que le juge-commissaire aurait du choisir l’offre dont le prix était le plus intéressant.
Il convient de préciser que l’ordonnance du juge-commissaire est susceptible d'un recours devant la cour d’appel ( C. com., art. R. 642-37-1 et R. 642-37-3 ) de la part de toute personne dont les droits et obligations sont affectés, hors le candidat à la cession qui n’a pas été choisi par le juge-commissaire.
L'article R. 642-37-1 du Code de commerce ouvre une voie de recours devant la cour d'appel contre les ordonnances du juge - commissaire rendues en matière cession d'actif fondée sur l'article L. 642-18 du même code.
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Maître JOAN DRAY
Avocat
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