La caution, poursuivie par les banques , dispose de plusieurs moyens de défense pour obtenir la décharge de son engagement et invoque , souvent, la disproportion de son engagement de caution , à ses facultés réelles de remboursement , lors de la souscription de l’engagement et lors de la mise en œuvre de la garantie.
Il existe un autre moyen de défense qui consiste pour la caution à invoquer la nullité de l’acte de cautionnement en raison de la violence morale exercée par la banque.
Il peut s’agir de l’usage de la pression financière , comme cause de nullité du contrat de cautionnement pour violence.
Dans une affaire intéressante , la Cour d’Appel de PAU a considéré que “Justifient l'annulation du cautionnement souscrit par le dirigeant en faveur de sa société les pressions exercées par la banque pour l'obtenir caractérisant une violence morale. “(CA Pau, 2e ch., 1re sect., 21 mai 2013, n° 12/00969, n° 13/2070)
Afin qu’un contrat de cautionnement soit valable, il est nécessaire que certaines conditions soient remplies. Parmi ces conditions se trouvent des conditions de fond comprenant la garantie d’un objet licite et certain, la capacité de la caution à s’engager mais plus particulièrement son consentement.
Ce dernier élément est celui qui fut l’objet du contentieux lors de cet arrêt de la cour d’appel de Pau en date du 21 mai 2013. Il existe 3 manières de vicier un consentement (art. 1130 nouveau du code civil) :
- Par l’erreur : erreur quant aux qualités essentielles du contrat pour lequel elle s’engage,
- Par le dol : c’est-à-dire des manoeuvres volontaires trompeuses du cocontractant (créancier) à l’égard de la caution sans lesquelles elle n’aurait jamais conclu le contrat,
- Par la violence : morale, physique (ancien art. 1112 du code civil) comme économique (article 1143 nouveau du code civil).
I. La violence, cas rare de vice du consentement de la caution.
Alors que les hypothèses de nullité pour erreur de la caution quant à notamment la solvabilité du débiteur, le risque pris par la caution ou encore pour dol sont monnaies courante, le vice de consentement de l’acte de cautionnement pour violence est une hypothèse rare, voire exceptionnelle.
En effet, la Cour de cassation s’est, à de nombreuses reprises, exprimée en défaveur de la caution en refusant notamment d’annuler son contrat de cautionnement pour violence alors même le créancier l’aurait harcelée téléphoniquement (cass. Com. 22 janvier 2013, 11-17.954), ou l’aurait menacée de perdre un concours de crédit (Cass. com., 3 mars 1987, n° 85-15157).
Par ailleurs, la conclusion d’un contrat de cautionnement « sous la pression des circonstances économiques » ne pouvait pas être annulé au motif que ces pressions n’étaient pas « assimilables à une violence morale exercée par le créancier » (Cass. Com. 23 juin 1992, 90-14.642).
Quid d’une banque menaçant un dirigeant de ne pas payer les salaires à la date convenue mettant en péril la survie de la société si ce dernier ne devient pas une caution ?
II. La menace d’une banque de ne pas payer les salaires à temps ; pourtant nécessaire à la survie de la société, motif de demande de nullité du contrat de cautionnement pour violence.
On assiste au travers de cet arrêt à un revirement de jurisprudence ou du moins un assouplissement de la caractérisation de la violence par les juges du fond.
En l’espèce, le dirigeant d’une société s’était portée caution solidaire auprès d’une banque, quelques jours avant le redressement judiciaire de la société convertie par la suite en liquidation judiciaire.
Après la mise en liquidation ladite société, le dirigeant demande la nullité de son engagement de caution pour violence morale ; la banque l’ayant forcée à conclure le contrat de conclusion sans lequel le dépôt de bilan de la société était la seule issue.
Dans cette décision, la cour d’appel répond par la négative et annule le cautionnement conclu dans de telles conditions. Pour apprécier la violence, l’article 1112 ancien du code civil énonce : « Il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. On a égard, en cette matière, à l'âge, au sexe et à la condition des personnes ».
Ainsi, en constatant que la banque était informée des difficultés financières de la société ainsi que de l’importance du versement des salaires à la date fixée et en énonçant que la banque aurait commis une faute en conditionnant ces versements à la signature de la caution, la cour d’appel qualifie le comportement de la banque d’acte de violence justifiant la demande en nullité de la caution.
En effet, elle conclut sur le fait que la banque « a placé le dirigeant de société dans une situation où il ne pouvait pas, moralement, refuser la signature de cet engagement vis-à-vis de ses salarié ».
La Cour d’Appel a considéré que « la banque, en plaçant son client devant ce dilemme, a exercé une pression qui excède les rapports entre un chef d'entreprise et son partenaire financier et caractérise une violence morale qui justifie l'annulation du cautionnement ».
Quid de la portée de cet arrêt ? Toute pression d’une banque sur son partenaire financière est-elle de nature à entrainer la nullité du contrat de cautionnement souscrit par ce dernier ?
III. L’apport de preuves par la caution d’une véritable pression, une limite à la demande en nullité.
Néanmoins, une limite est à spécifier. Dans un arrêt postérieur à ce dernier (Cass. Com 28 janvier 2014, 12-28.480), la Cour de Cassation énonce une solution totalement différente, restreignant les cas de nullité pour violence.
Dans cet arrêt, elle retient que la caution, menacée de suppression d’un concours financier nécessaire à la survie de la société, n’avait subie « aucune forme de pression psychologique ou autre de nature à faire impression sur une personne raisonnable et lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent au sens de l’article 1112 du Code civil ».
Cette solution démontre alors un retour à une difficile appréciation de la violence, excluant les cas de pression d’une banque des causes de nullité. L’apport des preuves de la violence par la caution relève alors d’une véritable épreuve.
La réforme du droit des contrats codifiant à l’article 1143 nouveau du code civil la violence économique viendra peut-être admettre de nouveaux cas de violence à l’égard des cautions.
Notre cabinet intervient pour vous assister et vous représenter , dans ce type de contentieux .
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JOAN DRAY
Avocat
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