Contrat d'assurance vie : désignation du bénéficiaire
Un employé de l’assureur peut-il être désigné comme bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie?
Faits
Une femme souscrit trois contrats d’assurance vie auprès de Groupama Vie. Pour l’un d’entre eux, elle désigne l’employé de Groupama auprès de qui elle a signé l’ensemble des contrats. A son décès, sa sœur et unique héritière assigne l’assureur en paiement du capital décès dû au titre de chacun des contrats. L’héritière évincée accuse l’employé de Groupama d’avoir abusé de la faiblesse de sa sœur et falsifié sa signature.
Décision
Confirmant le jugement du TGI de Bobigny (25 avril 2007), la cour d’appel de Paris estime que « la désignation de l’employé de l’assureur Groupama Vie n’est pas en l’espèce entachée de nullité ». L’héritière est déboutée de sa demande.
Commentaire
En vertu de l’article L132-8 du code des assurances, le souscripteur d’un contrat d’assurance vie est libre de désigner la personne de son choix comme bénéficiaire. Dans cet arrêt, la cour d’appel de Paris estime que rien n’empêche l’assuré de désigner comme bénéficiaire l’employé de l’assureur qui lui a fait souscrire son contrat. En l’espèce, l’héritière évincée du bénéfice du contrat soulève la nullité pour cause « d’illégalité, de contrariété aux bonnes mœurs ou à l’ordre public ». Elle soutient, en effet, que « la désignation de l’employée, également porteur ou réalisateur des contrats, est contraire aux bonnes mœurs et en tout cas aux usages de la profession ». De son côté, Groupama vie (responsable du fait de ses salariés) soutient son employée et conteste « l’existence de disposition, même déontologique, interdisant la désignation d’un salarié en sa qualité personnelle de bénéficiaire du contrat d’assurance vie ». L’assureur invoque également les articles L 132-12 et L132-13 du code des assurances permettant au souscripteur d’un contrat d’assurance de déroger au droit de succession et d’évincer totalement ses héritiers, sans que ces derniers puissent en induire une fraude à leurs droits. Ce que la cour d’appel approuve. Par ailleurs, la jurisprudence a estimé que « le médecin qui a traité une personne pendant la maladie dont elle décède, ne peut pas profiter de sa désignation comme bénéficiaire quand celle-ci a eu lieu au cours de la dernière maladie dont est décédé le patient qui l'a désigné » (Civ.1 e, 1 er juillet 2003). Idem pour une psychiatre-psychanalyste (Civ. 1re, 4 novembre 2010, pourvoi n°A 07-21303.).
Extrait de l'argus assurance. parution de jeudi 27 janvier 2011.