Environnement : le dernier exploitant responsable de la pollution
Civ.3 e, 15 décembre 2010, pourvoi n° 09-70.538
Faits
En 1973, le sol d’une exploitation classée (ICPE) est pollué à la suite du débordement d’un réservoir de fioul. L’exploitant (Copitherm) n’effectue aucun travaux de dépollution jusqu'à la restitution du terrain au propriétaire en 1992. Un an plus tard, le terrain est cédé à un promoteur qui y construit des immeubles d’habitation et les vend en l’état de futur achèvement (VEFA) à une SCI. En 2004, l’ensemble est acquis par la société SOFI. Entre temps, l’administration prend trois arrêtés prescrivant les mesures de décontamination (premier en 1997, puis en 2004, et 2007) et met en demeure Shell (venant au droit de Copitherm) de respecter les mesures prescrites. Les travaux ne seront finalement effectués par cette dernière qu’en 2008. S’estimant victime d’un préjudice financier et d’image, la nouvelle propriétaire du site (SOFI) assigne Shell en réparation.
Décision
La cour d’appel de Versailles (le 15 octobre 2009) rejette sa demande relevant que les modalités de dépollution définies par le dernier arrêté préfectoral en 2007, s’étaient imposées en dernier lieu à la société Shell et que les travaux prescrits par l’arrêté avaient été effectués par cette dernière. La cour de cassation sanctionne cette décision : Les juges du fond qui avaient constaté que l’exploitation avait cessé en 1992, auraient dû rechercher « si le dernier exploitant n’avait pas commis une faute pour n’avoir pas remis le site dans un état tel qui n’y manifeste aucun des dangers ou inconvénients en l’état ».
Commentaire
L’exploitant d’une installation classée (ou ses ayants causes) à l’origine de la pollution a non seulement l’obligation de remettre le site en état, mais doit le faire le plus tôt possible après l’arrêt préfectoral qui l’y oblige. Plus il tardera, plus le préjudice financier et d’image subit par le propriétaire sera important. Dans cet arrêt, la cour considère que le préjudice financier et d’image subit par un propriétaire du fait de la pollution de son terrain, dont il n’est pas à l’origine, peut trouver sa cause dans la faute du dernier exploitant qui n’a pas respecté les prescriptions légales de remise en état. C'est-à-dire d’avoir décontaminé le site dès le premier arrêté, en 1997. Un raisonnement qui semble logique au vu du principe du pollueur-payeur.
Maître Maïlys DUBOIS
Extrait de l'Argus de l'assurance parution de mercredi 19 janvier 2011