La clause de domicile ou de résidence : une atteinte à la vie privée du salarié
Dans le cadre d'une relation de travail, l'employeur peut, en insérant une clause de domicile ou de résidence, imposer à un salarié d'être domicilié ou de résider sur son lieu de travail ou à proximité.
Le domicile "qui est déterminé par le lieu du principal établissement, est le siège légal de la personne, le lieu auquel la loi la rattache, qu'elle y soit présente ou qu'elle s'en éloigne" (F. Terré et D. Fenouillet, Droit civil, Les personnes, La famille, Les incapacités : Précis Dalloz, 7e éd., 2005, n° 197).
La résidence se définie comme l'endroit où une personne vit de façon normale.
Cette clause a suscité un contentieux.
I/ L'interdiction des clauses de domicile/ résidence
Au visa de l'article 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, la Cour de cassation a considéré que « toute personne a droit au respect de son domicile ; le libre choix du domicile personnel et familial est l'un des attributs de ce droit » (Cass. soc., 12 janv. 1999 : Juris-Data n° 1999-000086).
Cela limite le pouvoir de l'employeur.
Selon l'article L.1121-1 du Code du travail « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
Cet article permet de limiter le choix de son domicile par le salarié. En effet, si la nature des tâches que le salarié à accomplir et si c'est proportionné au but recherché, l'employeur pourra porter atteinte au droit au respect de son domicile.
Les tribunaux considèrent rarement qu’une clause de domicile est valide.
Les tribunaux ont estimé que des avocats salariés ne pouvaient pas se voir imposer un lieu de domicile sous prétexte d'une bonne intégration dans l'environnement local (Cass. soc., 12 juill. 2005, n° 04-13.342 : JurisData n° 2005-029503).
De plus, la Cour de cassation a jugé qu'il n'y avait pas de raison pratique légitime d'exiger de salariés affectés à la surveillance d'un immeuble ou chargés de son entretien de résider sur le site où ils exercent leurs fonctions quand ils peuvent exécuter leurs prestations sans perturbation en habitant ailleurs (Cass. soc., 13 avr. 2005, n° 03-42.965 : JurisData n° 2005-028036).
Un salarié, ayant pour fonction de veiller au confort physique et moral de majeurs sous tutelle ou curatelle logés dans un appartement, a été licencié pour ne pas avoir respecté une obligation contractuelle.
En effet, une clause lui imposait d'avoir son domicile à moins de 200 mètres de son lieu de travail. Or il avait déménagé à 20 km.
La cour d'appel avait jugé que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse.
Mais la cour de cassation va casser la décision aux motifs que l'arrêt ne permet pas d'établir que l'atteinte au libre choix par le salarié de son domicile était justifiée par la nature du travail à accomplir et proportionnée au but recherché.
Elle rappelle au visa des articles 8 de la CESDH et 9 du Code civil que « Toute personne dispose de la liberté de choisir son domicile. Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. ». (Sociale 28 févr. 2012 n° 10-18.308, Mme C. c/ Association Maison départementale de la famille).
II/ L'admission de certaines limites apportés au droit de choisir librement son domicile
Dans la fonction publique, il existe des obligations de résidence pour certaines catégories de fonctionnaires :
– personnels de la police nationale y sont astreints (L. n° 95-73, 21 janv. 1995, art. 19),
– personnels de l'enseignement supérieur (C. éduc., art. L. 952-5).
– fonctionnaires de l'Union européenne sont « tenus de résider au lieu de leur affectation ou à une distance telle de celui-ci qu'ils ne soient pas gênés dans l'exercice de leurs fonctions » (Statut des fonctionnaires de Communautés européennes, art. 20)
Certains employeurs mettent à la disposition de leurs salariés un logement de fonction situé au sein de l'établissement afin d'y réaliser des astreintes.
L’astreintes se définie « période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise » (Article L.3121-5 du Code du travail).
L'obligation de résider dans un lieu particulier pour effectuer des astreintes relèvent de l'organisation de la vie professionnelle. Il peut être dans l'intérêt de l'entreprise que le salarié reste sur place afin de réaliser ses astreintes.
En principe, le salarié conserve une liberté de choix de son domicile. En effet, il peut vivre ailleurs qu'au lieu de son logement de fonction (Cass. soc., 13 avr. 2005 - Cass. soc., 12 nov. 2008).
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.
Vous pouvez me poser vos questions sur conseiller juridique.net : http://www.conseil-juridique.net/joan-dray/avocat-1647.htm
Joan DRAY
Avocat à la Cour
joanadray@gmail.com
76/78 rue Saint-Lazare
75009 PARIS
tel:09.54.92.33.53
FAX: 01.76.50.19.67