I/Le principe de la clause résolutoire.
La clause résolutoire, permet d'obtenir la résiliation automatique du bail en cas d'infraction aux obligations qu'elle vise. En effet, les parties conviennent à l'avance que le contrat sera résilié de plein droit du seul fait du manquement sans que les tribunaux ne puissent si opposer.
Comme la clause résolutoire est dangereuse pour le locataire, la sanction pouvant être disproportionnée au manquement, elle n'est admise que pour des manquements essentiels aux intérêts du bailleur.
Cela étant , alors que le domaine d'application de la clause résolutoire est plus stricte en matière de baux d'habitaion, ( Voir article LA CLAUSE RESOLUTOIRE ET LES BAUX HABITATION), le législateur a accordé au bailleur la possibilité de sanctionner le locataire pour des manquements diverses (non paiement des charges, non exécution d'une obligation de faire, non respect des de la destination du bail etc......).
Il convient de rappeler les conditions préalables à la mise en oeuvre de la clause résolutoire.
Le bailleur pourra se prévaloir de ladite clause aux conditions suivantes:
-le locataire aura commis une faute et / une infraction aux clauses et conditions du bail commercial,
- cette infraction devra être sanctionnée par la clause résolutoire,
- cette infraction devra avoir perduré au- delà d'un mois à compter du commandement,
-la bailleur devra faire preuve de bonne foi dans l'application de la clause.
De par ces conditiions, le bailleur devra veiller à la rédaction de la clause résolutoire et notamment s'assurer que les divers manquements qu'il pourrait imputer à son locataire, sont prévus et sanctionner par la rédaction de la clause.
II/La procédure.
Au préalable, il convient de préciser que la mise en oeuvre de la clause résolutoire s'applique tant durant le bail en cours d'exécution mais également en cours de tacite reconduction et de renouvellement.
L'article L. 145-41, alinéa 1er du Code de commerce dispose que la résiliation de plein droit ne produit effet "qu'un mois après un commandement demeuré infructueux",
Le bailleur qui constate que le locataire ne respecte pas les clauses et conditions du bail et quel que soit le motifa allégué devra lui adresser à un « commandement de payer visant la clause résolutoire ».
En premier lieu, le commandement doit être signifié par acte d'Huissier de Justice.
En second lieu, le commandement doit viser la clause résolutoire (en la repoduisant) et établir les manquements reprochés.
En troisième lieu, le commandement devra indiquer de façon impérative le délai d 'un mois à l'expiration duquel l'infraction et / le manquement devront avoir cesser et les sanctions visés.
Afin de protéger les intérêts du locataire, le commandement doit respecter un formalisme très strict au risque d’être annulé pour vice de forme, notamment l’information de l’intention de mettre en jeu la clause résolutoire si le locataire n’exécute pas ses obligations dans un délai d’un mois à compter de la réception du commandement.
L’absence d’indication du délai d’un mois, qui vise à permettre au locataire de régulariser sa situation, est sanctionnée par la nullité du commandement (article L. 145-41 du Codcommerce).
La Cour de Cassation vient de juger dans un arrêt en date du 8 décembre 2010 que "la clause prévoyant la résiliation de plein droit du bail commercial après un commandement demeuré infructueux ne peut prévoir un délai inférieur à un mois car elle tenait en échec les dispositions d'ordre public de l'article L. 145 41 du code de commerce aux termes duquel toute clause prévoyant la résiliation de plein droit ne produisait effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux, en a justement déduit que, l'article L. 145 15 du même code édictant la nullité de toute clause ayant pour effet de faire échec aux dispositions de l'article L. 145 41, la clause résolutoire insérée au bail litigieux était nulle ;"(Arrêt n° 1451 du 8 décembre 2010 (09-16.939) - Cour de cassation - Troisième chambre civile).
Cet arrêt rappelle que les dispositions de l'article L145-41 sont d'ordre public et que les parties ne peuvent y déroger par une clause conventionnelle.
Le législateur a édicté cette disposition afin de protéger le locataire et de lui permettre de trouver une solution dans un déali raisonnable.
Le commandement de payer visant la clause résolutoire devra être signifié au locataire par le biais d'un Huissier de justice et devra indiquer avec précision les clauses du contrat auxquelles le preneur aurait contrevenu, de même que les griefs formulés à son encontre ce qui implique la justification et le détail des sommes mises en recouvrement au titre du loyer ou des charges (Cass. 3e civ., 14 déc. 1988 : Rev. Loyers 1989, p. 79. – Cass. 3e civ., 23 nov. 1988 : Loyers et copr. 1989, comm. 21).
Si le commandement ne respecte pas ce formalisme, la clause résolutoire peut s'avérer inapplicable (Cass. 3e civ., 28 mars 1995 : Rev. loyers 1995, p. 397) et la validité du commandement remise en cause.
Le locataire dispose alors d'un délai d’un mois pour s'acquitter de sa dette.
A défaut pour le locataire d'avoir, dans le délai d'un mois, demandé des délais de paiement au juge ou d'avoir réglé l'arriéré et / ou d'avoir remédié à l'infraction établie par le commandement, le bail est résilié de plein droit, il devient un occupant sans titre et peut s'exposer à des sanctions complémentaires ( frais de poursuite, indemnités d'occupationetc...).
Le bailleur doit alors saisir le juge aux fins de constat de la résiliation du bail.
•Sur l'exigence de bonne foi du bailleur
La troisième chambre civile de la cour de cassation vient de rappeler dans un arrêt du 3 novembre 2010 les limites à la mise en eouvre de la clause résolutoire et notamment l'obligation du bailleur de faire preuve de bonne foi (Civ. 3e, 10 nov. 2010, FS-P+B, n° 09-15.937)
Dans cet arrêt , le preneur reprochait au juges d'avoir constaté la clause résolutoire sans avoir au prélable constaté la bonne foi du bailleur et il est vrai qu'au cas d'espèce le bailleur avait cherche en réalité à supprimer uneexploitation concurrente d'un commerce qu'il exploitait.
Pour un autre exemple de mauvaise foi du bailleur, la Cour de cassation a jugé que des bailleurs ne pouvaient ignorer, lors de la délivrance du commandement de payer, que l'état d'insalubrité des lieux rendait impossible l'exploitation normale d'un restaurant, c'est donc à bon droit que le juge a constaté que les bailleurs avait invoqué en toute mauvaise foi la clause résolutoire et ont refusé de donner effet au commandement. (cass 11 février 2004).
Il n'est pas inutilde de rappeler qu'il appartenait au bailleur d'établir la persistance de l'infraction aux clauses du bail après l'expiration du délai de mise en demeure .
IV/ les procédures de secours au bénéfice du locataire.
Dans la pratique, il n'est pas rare de voir des locataires négligents ou qui n'ont pas pris conscience des sanctions qu'il peuvent encourir, notamment la perte de leur bail commercial et la disparition de leur fonds de commerce.
En effet, il est des cas où des locataires ont perdu leur droit au bail pour des loyers impayés dont le montant est manifestemnt dérisoire par rapport à la valeur de leurs fonds de commerce.
Il est donc utile d'informer le locataire qu'il disposent de procédures lui permettant d'éviter une issue dramatique.
La suspension de la réalisation de la clause résolutoire
L. 145-41, alinéa 2, du Code de commerce permet au juge d'accorder au débiteur des délais en suspendant, sous certaines conditions, les effets de la clause résolutoire.
Ce texte dispose désormais :
"Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée (....)"
La demande de délais est faite devant le Tribunal, tant que la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée.
On se trouve dans le cas où le commandement a été signifié et le délais d'un mois n'a pas encore expiré, la clause résolutoire n'est pas encore acquise.
Il existe une autre solution de sauvetage qui consiste pour le locataire, qui est attrait par le bailleur devant le Tribunal d'une demande de constation de la clause résolutoire, à solliciter des délais.
La demande de délais doît être présentée par le locataire et n'est jamais relevé d'office par le Tribunal.
Le locataire peut donc, même s’il a laissé passer le délai d’un mois, et même si une ordonnance de référé a été rendue constatant la résiliation du bail tant que cette décision n’est pas devenue irrévocable, solliciter des délais de règlement et demander la suspension des effets de la clause résolutoire.
Le juge dispose d’un pouvoir souverain pour accéder ou non à la demande du locataire. En effet, les délais sont octroyés en fonction de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier. Par exemple, le juge pourra apprécier le comportement du locataire et notamment les efforts qu’il a pu faire pour tenter de régulariser sa situation.
En définitive, le locataire pourra solliciter des délais:
- dans le délai indiqué par le commandement visant la clause résolutoire,
- devant le juge des référés à titre parincipal ou par voie reconventionnelle,
- devant la Cour d'Appel.
Bien évidemment , la suspension des effets de la clause résolutoire sera conditionnée par le réglement des causes du commandement.
Des délais peuvent être accordés dans la limite de deux ans compte tenu à la fois "de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier".
En conséquence, l'intervention du juge aboutira peut être à effacer les effets pourtant acquis de la clause résolutoire, ce qui lui fait perdre son automaticité et une partie de son “intérêt.”
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements complémentaires.
Maître Joan DRAY