L’assurance vie est devenue un moyen de protection familiale et sociale et un instrument d'épargne qui, parce qu'il s'agit d'une épargne longue et stable, bénéficie d'une fiscalité incitative.
Par le biais de ce contrat, l'assureur s'engage, en cas de décès de l’assuré, à verser un capital à un bénéficiaire qui l’a accepté.
En l'absence d'acceptation du capital, le souscripteur demeure libre du choix du bénéficiaire et des modifications qu'il entendrait apporter, notamment, quant aux adaptations justifiées par sa situation personnelle ou familiale.
Mais, dès lors qu'elle a été acceptée, la désignation du bénéficiaire de l'assurance ne peut plus être révoquée par le stipulant (C civ art 1121).
En effet, l'acceptation emporte consolidation du droit du tiers bénéficiaire et s'oppose à toute modification par le souscripteur de la clause d'attribution du bénéfice du contrat. Cependant, peut-il encore en dépit de cette consolidation demander le rachat de son contrat ?
Il convient de rappeler que le rachat est l’opération qui résulte de la demande formulée par le souscripteur du paiement immédiat de sa créance. L'obligation conditionnelle ou à terme de l'assureur prend alors fin.
Le domaine du rachat est assez limité dans la mesure où seules les assurances vie-entière, les assurances en cas de vie avec contre-assurance, les assurances "mixtes", les assurances à terme fixe peuvent faire l’objet d’un rachat.
En tout état de cause, dès l’instant où les conditions légales sont remplies, l’assureur ne peut pas refuser la demande de rachat qui lui est faite par le souscripteur (C assur L132-21 et L132-23).
Cet article a pour objet de rappeler les obligations d’informations mis à la charge de l’assureur en la matière avant de voir les conséquences de l’acceptation du bénéficiaire sur la faculté de rachat du souscripteur.
I- L’information du souscripteur quant à sa faculté de rachat :
En la matière, les obligations d’informations mis à la charge de l’assureur sont très importantes.
Ainsi, l’article 132-5-1 du Code des assurances prévoit que la proposition d’assurance doit notamment indiquer la valeur de rachat au terme de chacune des huit premières années au moins.
De même, le règlement général établissant les modalités de calcul doit être communiqué au souscripteur à sa demande (art 132-21 C ass).
A chaque échéance annuelle de prime, l’assureur doit indiquer le montant de la valeur de rachat et préciser « en termes précis et claires » ce que signifie l’opération de rachat et quelles en sont les conséquences légales et contractuelles (C ass art L132-22).
Enfin, le contrat doit indiquer le montant des frais prélevés en cas de rachat (C cass art R132-3).
Cette information donnée au souscripteur doit être honnête. Tel n’est pas le cas quand il apparait que la seule indication portée sur le bulletin d’un taux de frais de 0,80% s’était avérée erronée, l’assureur se rendant ainsi coupable de réticence dolosive (Cass 1re civ 1er février 2000 Resp civ et assur, 2000 comm 137).
II- Les conséquences de l’acceptation du bénéficiaire sur la faculté de rachat du souscripteur :
Aux termes de la loi n°2007-1775 du 17 décembre 2007, le souscripteur ne peut racheter librement le contrat d’assurance vie s'il a été régulièrement accepté par le bénéficiaire à compter du 19 décembre 2007.
En effet, la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice d’un contrat d’assurance vie est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable par son
acceptation dans les conditions prévues par la loi (C. assur., art. L. 132-9 II).
En conséquence, le souscripteur ne peut exercer sa faculté de rachat sans l'accord du bénéficiaire acceptant (C assur art L132-9 I)
Toutefois, la question se pose encore pour les contrats d’assurance dont l’acceptation du bénéficiaire est antérieure au 19 décembre 2007.
Cette question divise encore la doctrine mais a été tranchée par la Cour de cassation.
Ainsi, dans un arrêt en date du 22 février 2008 (Cass, ch. mixte, 22 févr. 2008 JCP G 2008 II 10058), la Cour de cassation réunie en chambre mixte a considéré que « lorsque le droit de rachat du souscripteur est prévu dans un contrat d’assurance sur la vie mixte, le bénéficiaire qui a accepté sa désignation n’est pas fondé à s’opposer à la demande du rachat du contrat en l’absence de renonciation expresse du souscripteur à son droit ».
En d’autres, alors même que le bénéficiaire a accepté le capital, le souscripteur conserve sa faculté de rachat dès lors que ce droit est prévu au contrat sauf à avoir renoncé expressément à son droit.
Cette solution a été confirmé par un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation en date du 4 novembre 2010 (Cass. 2e civ., 4 nov. 2010, n° 09-70.606 : JurisData n° 2010-020627).
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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