1/ Principe d'une présomption de responsabilité du locataire
Les articles 1733 et 1734 édictent les règles de la responsabilité du locataire à l'égard du bailleur en cas d'incendie de l'immeuble loué.
L’article 1733 du code civil dispose que :
« Il répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve :
Que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure,
ou par vice de construction, Ou que le feu a été communiqué par une maison voisine ».
L’article 1734 du code civil dispose que :
« S'il y a plusieurs locataires, tous sont responsables de l'incendie proportionnellement à la valeur locative de la partie de l'immeuble qu'ils occupent ;
À moins qu'ils ne prouvent que l'incendie a commencé dans l'habitation de l'un d'eux, auquel cas celui-là seul en est tenu ;
Ou que quelques-uns ne prouvent que l'incendie n'a pu commencer chez eux, auquel cas ceux-là n'en sont pas tenus »
2/ Conditions de la responsabilité :
Cette responsabilité contractuelle ne peut jouer que dans la mesure où existe un contrat.
La présomption est applicable à une convention d’occupation précaire.
L’application de l’article 1733 du code civil suppose la qualité de locataire, en revanche elle ne cesse pas par le fait qu'ils se sont perpétués dans les lieux loués au-delà de l'expiration du bail et contre la volonté du propriétaire.
Bailleur et locataire peuvent valablement convenir d'augmenter, de diminuer ou même de supprimer la responsabilité qui incombe au preneur en vertu du droit commun. En effet, les dispositions sur la responsabilité du locataire en cas d' incendie ne sont pas d'ordre public (Cass. civ., 26 juin 1922).
3/ Conséquences de la destruction par incendie de la chose louée :
Dans le cas d'une destruction partielle due à un incendie, la présomption de responsabilité du locataire par application de l'article 1733 du Code civil ne fait pas obstacle à ce qu'il demande, sur la base de l'article 1722 du même code, une diminution du prix du loyer.
L'importance de la destruction doit être appréciée en fonction de la destination convenue par les parties. Si elle n'était que partielle, les lieux demeurant utilisables, le bail ne devrait pas être résilié
Il peut y avoir une clause de reconstruction à l’identique imposée au bailleur dans le contrat de bail qui l’oblige à supporter la charge des surcoûts dus à l'obligation de respecter les normes de sécurité en vigueur.
4/ Sur la présomption de responsabilité du locataire :
En ce qui concerne la chose concernée : ça s’applique aux immeubles bâtis, ainsi qu’aux meubles, et aux dépendances de la chose louée (par exemple la caravane du locataire accolée au local loué).
En revanche les parties communes de l’immeuble ne tombent pas sous la responsabilité du locataire. La responsabilité ne s’étend pas non plus au feu qui s’est propagé à l’immeuble voisin, même si c’est le même propriétaire.
En ce qui concerne les personnes concernées : la responsabilité du locataire est engagée, et il est tenu pour responsable des fautes commises par toutes les personnes que le locataire a fait entrer dans les lieux, même si ce n’est que temporairement (exemple du plombier).
5/ Sur l’action en responsabilité :
Il est à noter que concernant l’action en responsabilité : seul le bailleur peut invoquer l’article 1733, et il ne peut l’invoquer que contre le locataire.
De plus, si le bailleur est lui-même locataire d’une partie de l’immeuble, alors il est en état de collocation, et il doit rapporter la preuve de la faute du locataire pour que la responsabilité de celui-ci soit engagée.
6/ Les causes d’exonération du locataire :
Il en existe 3 où le locataire doit prouver :
-que l’incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure (la preuve se fait par tout moyen, témoin ou même présomption ; c’est l’exemple de la foudre ou d’un cambriolage). Mais il ne faut qu’aucune faute ou imprudence qui ait précédé le cas fortuit ne soit imputable au locataire ou aux personnes vivant avec lui. Le locataire n'est pas responsable de l'incendie qui résulte d'une faute du bailleur, et en particulier d'un défaut d'entretien de la chose louée qui lui est imputable, du moment que l’incendie n’était ni prévisible, ni irrésistible.
-que l’incendie est imputable à un vice de construction : le vice doit être à l’origine de l’incendie, c’est l’exemple du défaut d’entretien, ou de la vétusté.
-que le feu a été communiqué par une maison voisine : l'exonération est prouvée par le fait matériel de l'antériorité du sinistre voisin par rapport au sinistre ayant détruit les lieux du preneur.
Toute autre preuve ne sert à rien pour décharger le locataire de sa responsabilité.
7/ Sur l’indemnité à verser par le locataire :
Les dommages-intérêts auxquels le locataire peut être condamné doivent être fixés d'après les règles des articles 1149 à 1151 du Code civil. Ils comprennent donc, dans le cas général, le préjudice qui a pu être prévu lors de la passation du bail, soit une indemnité pour les frais de reconstruction et pour les loyers perdus. Lorsqu'il y a eu dol ou faute lourde de la part du locataire, les dommages-intérêts doivent couvrir tout le dommage causé directement par l'incendie sans être limités par le principe de prévisibilité.
Le propriétaire ne peut exiger qu'une indemnité ; il ne peut contraindre le locataire à la reconstruction de l'immeuble.
Indépendamment de l'indemnité pour reconstruction, le preneur est tenu d'indemniser le bailleur de la perte de loyer subie par lui pendant le temps nécessaire à la reconstruction et à la relocation.
8/ En cas de pluralité de locataires dans l’immeuble :
Dans une hypothèse très fréquente, en matière de baux à loyer à usage d'habitation, l'immeuble est occupé par plusieurs locataires. L'article 1734 décide qu'alors tous les locataires sont en principe responsables de l'incendie, à moins qu'ils ne puissent établir l'une des deux causes d'exonération prévues par ce texte. Cette responsabilité est fondée sur le fait que tous les locataires sont gardiens de la chose louée et à ce titre tenus de la restituer.
Il existe alors 2 exonérations possibles pour les locataires :
-soit que l'incendie a commencé dans l'habitation de l'un des locataires, auquel cas celui-là seul est tenu ;
-soit que quelques-uns ne prouvent que l'incendie n'a pu commencer chez eux, auquel cas ceux-là ne sont pas tenus.
Et concernant l’étendue de la responsabilité ici : il s’agit d’une contribution proportionnelle à la valeur locative de la partie d'immeuble louée.
Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements.
Maître Joan DRAY