Ancien dirigeant d’une entreprise mise en liquidation judicaire, vous être frappé d’une interdiction de gérer une société ? La loi vous offre la possibilité de vous en sortir.
Le droit des procédures collectives contient des mesures de sanction contre le chef d’entreprise lorsqu’il apparait que la faillite de la société résulte de son incompétence ou de sa malhonnêteté.
Ainsi, le tribunal saisi de la procédure collective peut condamner le dirigeant à différentes sanctions : comblement de l’insuffisance d’actif, faillite personnelle, interdiction de gérer,….
Le tribunal correctionnel peut, quant à lui, punir le dirigeant pour banqueroute.
Dans les faits, l’interdiction de gérer constitue une sanction fréquente.
Dans certains cas, elle est directement prononcée par le tribunal. Dans d’autres, elle résulte du prononcé d’une faillite personnelle. En effet, la faillite personnelle entraîne de plein droit l’interdiction de diriger une entreprise (art L653-11 C com).
Elle est prononcée par une durée laissée à l’appréciation souveraine du juge que ne peut toutefois excéder 15 ans (art L653-11 C com).
Cet article a pour objet de préciser les circonstances dans lesquels le dirigeant peut retrouver le permis de diriger une entreprise.
- Cessation de plein droit des sanctions :
Tout d’abord, à l’arrivée du terme fixé par le jugement de condamnation, le dirigeant retrouve de droit sa capacité « sans qu’il y ait lieu au prononcé d’un jugement » (art L653-11 al 1 C com)
De même, dès lors que les créanciers ont tous été désintéressés, le jugement de clôture pour extinction du passif rétablit le chef d’entreprise ou le dirigeant de la personne morale dans tous ses droits et le dispense ou relève de toutes les déchéances, interdictions et incapacité prononcé à son encontre (article L653-11 al 2 C com).
Cette hypothèse qui à l’origine ne bénéficiait qu’aux entrepreneurs individuels a été étendue par la loi de 1985 aux dirigeants de personnes morales.
Elle joue aujourd’hui au profit de toute personne physique passible de sanction professionnelle, quelle que soit la cause du jugement de clôture. Ainsi, peu importe que les créanciers aient été désintéressés par le liquidateur ou après exécution d’une condamnation pour insuffisance d’actif.
Enfin, une autre possibilité s'offre au dirigeant lorsque la durée de la sanction n'a pas expiré et que la procédure n'est pas clôturée : l'action en relevé de déchéance, visée à l'article L. 653-11 alinéa 4 du Code de commerce.
- Sur l’action en relevée de déchéance :
Par cette voie, le dirigeant mis en interdiction de gérer ou en faillite personnelle peut présenter une requête au tribunal qui l'a condamné, en vue d'être relevé de cette déchéance.
Ce relèvement ne peut être accordé que si le demandeur établit qu'il a « apporté une contribution suffisante au paiement du passif » (art L653-11 al 4 C com).
La condition légale de ce cas est suffisamment vague pour que joue pleinement la liberté d’appréciation du tribunal saisie de la demande.
Ainsi, le juge saisi apprécie souverainement, in concreto, tant l'ampleur que l'effectivité de la contribution au passif, ainsi que l'étendue du relèvement, qui peut être total ou partiel.
A ce titre, il n'est pas nécessaire que tous les créanciers aient été désintéressés (CA Douai, 2e ch. 15 février 2001 : BICC 1er oct. 2001, n° 962), mais il est indispensable que la contribution soit significative (Cass com 3 novembre 1992 n° 90-19.545).
En outre, cette contribution doit être l’œuvre personnelle du demandeur, ce qui n’est pas le cas de dégrèvements fiscaux (CA Dijon 1ère ch. 24 novembre 1998 : JurisData n° 1998-045975).
Il existe également, depuis la loi de sauvegarde, pour l’interdiction de gérer de l’article L653-8, un nouveau motif de relèvement: le fait de présenter toutes garanties démontrant sa capacité à diriger ou contrôler une entreprise ou une personne morale (art L653-11 al 4).
Ces garanties peuvent consister en une formation professionnelle suivie par le condamné (art R653-4).
A cet égard, on peut signaler un arrêt de la Cour d’appel de Grenoble du 6 janvier 2011 aux termes duquel elle a considéré que si selon l’article 563-4, les garanties exigées par l'article L. 653-11, alinéa 4, peuvent consister en une formation professionnelle. Encore faut-il une formation sérieuse et en rapport avec la gestion d'une entreprise.
Tel n'est pas le cas si le dirigeant demandant le relèvement de l'interdiction de diriger une personne morale se prévaut du suivi d'une formation professionnelle sans rapport avec la gestion et la direction d'une entreprise, et de l'obtention, antérieure aux faits, d'un diplôme de licence en sciences économiques, alors qu'à l'évidence ce seul diplôme ne lui a pas conféré de compétences en matière de gestion (CA Grenoble, ch. com., 6 janv. 2011, n° 10/02747 : JurisData n°2011-003668).
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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