La maladie du salarié n’emporte en principe qu’une suspension du contrat de travail, et sa rupture par exception.
Dans le cas du licenciement, l’existence d’une cause réelle et sérieuse ne manquera pas d’être débattue, notamment dans le cadre de l’appréciation de l’ « abandon de poste » que nous étudierons dans cet article.
En principe, le licenciement d'un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap est discriminatoire, à moins que l’inaptitude du salarié ne soit constatée par un médecin du travail.
Ainsi, l’employeur souhaitant licencier un salarié malade doit suivre une procédure spéciale.
Après avoir rappelé ces règles, nous nous concentrerons sur le cas de l’abandon de poste à l’issue d’un congé maladie.
La procédure en cas de licenciement d’un salarié malade
Le salarié malade ne peut être licencié pour ce motif que si l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié pour maladie provoquent des perturbations dans le fonctionnement de l'entreprise et qu'elles rendent nécessaire le remplacement définitif de l'intéressé (Cass. soc. 13-3-2001 n° 99-40.110).
Ce ne sera cependant logiquement pas une cause de licenciement si elles sont la conséquence d'un harcèlement moral subi par le salarié (Cass. soc. 11-10-2006 n° 04-48.314).
Ainsi, si vous estimez que la dégradation de votre état de santé peut être due au harcèlement moral que vous subissez, veillez à en avertir le médecin du travail.
La lettre de licenciement revêt une importance particulière, puisqu’elle doit mentionner la perturbation du fonctionnement de l'entreprise, celle du service n'étant pas suffisante (Cass. soc. 2-12-2009 n° 08-43.486), et la nécessité du remplacement du salarié (Cass. soc. 19-10-2005 n° 03-46.847).
Le caractère définitif de cette nécessité sera apprécié par les juges du fond (Cass. soc. 10-11-2004 n° 02-45.187).
En cas d’inaptitude physique constatée par le médecin du travail, l’employeur doit, avant tout licenciement, rechercher les possibilités de reclasser l'intéressé dans un emploi compatible avec son état de santé.
L'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement contrôle, les efforts de reclassement fournis par l'employeur (Cass. soc. 10-11-2009 n° 08-42.660).
Dans le cas où le salarié peut reprendre son travail à la suite d’un arrêt maladie, son refus peut entraîner son licenciement immédiat et sans indemnités pour abandon de poste.
Le refus de reprendre le travail au terme d’un arrêt maladie est un abandon de poste justifiant le licenciement du salarié
Le salarié qui a été déclaré apte à la reprise de son poste par le médecin du travail doit réintégrer son emploi, à moins qu’il ne soit dans l’attente d’un certificat de prolongation (voir par exemple Cass. soc. 11 janvier 2006 n° 04-41.231).
Lorsque le salarié s’abstient de reprendre le travail alors qu’il en a été jugé apte par le médecin du travail, et que l’employeur lui en a formellement fait la demande, il commet une faute grave (Cass. soc. 30 mai 2007 n° 06-41.385).
Cette faute grave justifie le licenciement du salarié, comme la Cour de cassation a récemment eu l’occasion de le démontrer (Cass. soc. 20 octobre 2011 n° 10-24.059, Demir c/ Sté Saint Jean industries).
En l’espèce, un salarié avait subi une longue maladie justifiant un arrêt de travail.
Le médecin du travail avait ensuite déclaré que le salarié était redevenu apte à la reprise de son emploi.
Cependant, le salarié restait absent et n’avait pas réintégré son poste, en conséquence de quoi son employeur lui envoya à deux reprises une mise en demeure de reprendre le travail.
Ces mises en demeure restant sans réponse, l’employeur prononça ensuite un licenciement pour faute grave.
L’arrêt d’appel accueille les arguments de l’employeur et confirme le licenciement pour faute grave.
La Cour de cassation suit la Cour d’appel au motif que bien qu’ayant été déclaré apte à son emploi par le médecin du travail, le salarié « n'avait pas repris le travail en dépit de deux mises en demeure de son employeur sans donner de justification de son absence », l’employeur avait pu décider que son comportement rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave.
Il importe ici de souligner que l’employeur avait fait preuve de diligence en faisant parvenir deux lettres de mise en demeure au salarié, restées sans réponse.
Autre cas d’abandon de poste
Dans l’affaire précédente, le salarié n’avait pas souhaité justifier son refus de reprendre le travail.
Mais un arrêt de 2005 illustre la situation dans laquelle le salarié refusait de réintégrer son poste, malgré les mises en demeure adressées par son employeur, en raison de manquements qu’il reprochait à son employeur (Cass. soc. 7 juin 2005 n° 1352, Piétri c/ AAH).
Ces faits reprochés par le salarié à son employeur sont appréciés souverainement par les juges du fond.
Ainsi, ils qualifieront le licenciement comme étant sans cause réelle et sérieuse s’ils estiment que l’abandon de poste du salarié est justifié par les manquements de l’employeur à ses obligations.
Mais s’ils décident de ne pas retenir les arguments du salarié, le salarié sera alors considéré comme ayant abandonné son poste sans raison valable et l’employeur pourra procéder à un licenciement immédiat et sans indemnités.
En conséquence, si vous estimez être en droit de ne pas reprendre votre travail à l’issue d’un arrêt maladie, veillez à ce que les arguments que vous déploierez pour justifier des manquements de l’employeur à ses obligations soient suffisants pour emporter la conviction des juges.
Dans le cas contraire, vous pourriez être reconnu coupable d’un abandon de poste et privé de vos indemnités de licenciement.
Mon Cabinet est à votre disposition pour tous contentieux et conseils.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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