Il peut arriver que quelques temps après votre installation dans un logement loué à bail, vous vous apercevez qu’il souffre de graves défauts.
Dans ce cas, dans quelles conditions peut-on engager la responsabilité du bailleur ?
L’article 1721 du Code Civil prévoit que le bailleur doit garantir le locataire des vices cachés existant au jour de la signature du bail et ceux qui apparaîtraient postérieurement puisque l'obligation de jouissance paisible est une obligation continue qui dure tant que dure le bail.
La garantie est due au locataire pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage, quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail.
S'il résulte de ces vices ou défauts quelque perte pour le preneur, le bailleur est tenu de l'indemniser.
Dans un arrêt récent du 5 avril 2011, la Cour de Cassation avait considéré que « le vice n'était pas apparent, mais caché puisque découvert après la dépose d'un faux plafond.
Le bailleur doit garantie au locataire sans pouvoir invoquer la force majeure alors que le vice provenait d'un défaut d'entretien de sa part » (Cass. 3e civ., 5 avr. 2011, n° 10-15.475, F-D, Aumond c/ Entreprise Carolle T (pourvoi c/ CA Caen, 1re ch., 22 sept. 2009) : JurisData n° 2011-013039).
La Cour rappelle donc dans cet arrêt le principe formulé par l'article 1721 du Code civil.
Elle rejette le pourvoi du bailleur qui, faute de pouvoir se prévaloir d'une clause d'exonération en l'espèce, pourtant valable en matière de bail commercial, avait mis en avant que les conditions de la garantie n'étaient pas réunies.
Sa tentative de plaider le vice apparent et de mettre en avant la force majeure échoue.
Le vice était bien caché, tout au moins en ce qui concerne la partie de l'immeuble louée : le mauvais état de la poutre centrale et de la poutre de façade du plancher haut du local commercial, masqué par un faux plafond, n'était apparu en effet qu'après la dépose de ce dernier.
De plus, le vice ne résultait pas davantage d'un cas de force majeure, mais d'un défaut d'entretien du bailleur, révélé par un rapport d'expertise.
Les dommages et intérêts pour ouverture tardive du salon de coiffure compte tenu de la nécessité de remédier aux désordres constatés étaient, par conséquent, justifiés, sans qu'il soit nécessaire de s'attarder sur le fait que le bailleur n'avait pas précisément été mis en demeure de réaliser les travaux dans un certain délai.
Il faut savoir que le bailleur est garant des vices qui empêchent l'usage de la chose mais il n'est pas nécessaire que les vices rendent l'usage de la chose complètement impossible.
Il suffit, en effet, qu'ils soient de nature à entraver la jouissance du preneur et à lui causer un trouble véritable.
Par ailleurs, le bailleur est responsable non seulement des vices de la chose principale, mais encore de ceux portant sur les accessoires de cette chose, lorsqu'ils sont de nature à en empêcher la jouissance.
Le bailleur peut toutefois s'exonérer, totalement ou partiellement de sa responsabilité s'il apporte la preuve que l'accident provient d'une cause étrangère revêtant le caractère d'un cas fortuit ou de force majeure, ou qu'il est dû à la faute imprévisible et inévitable de la victime.
Pour que joue la garantie du bailleur, il faut que le locataire prouve l'existence d'un vice caché et le lien de causalité entre ce vice et le dommage subi.
Les vices apparus en cours de bail doivent être dénoncés au bailleur. Le locataire qui n'a pas mis le bailleur en demeure de faire cesser le vice ne peut obtenir réparation des troubles de jouissance
Lorsque le trouble subi par le locataire affecte une partie commune de l’immeuble, l'article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 sur la copropriété prévoit la responsabilité du syndicat.
Cette responsabilité spéciale du syndicat des copropriétaires peut être invoquée par les copropriétaires ou par un tiers, notamment le locataire.
Dans ce cas, le preneur ne peut agir en garantie des vices cachés sur le fondement de l'article 1721 du Code civil contre son bailleur, dès lors que celui-ci n'a pas qualité pour entreprendre seul les travaux de réparation affectant les parties communes (CA Versailles, 28 mars 1984 : D. 1985, inf. rap. p. 101. – CA Paris, 18 mai 1999 : JurisData n° 1999-023198 ; Loyers et copr. 1999, comm. 277).
Il en irait autrement s'il était démontré que le bailleur n'a pas accompli, à l'égard du syndicat, les diligences nécessaires pour satisfaire à la demande du locataire (Cass. 3e civ., 18 nov. 1992, n° 91-12.984 : JurisData n° 1992).
Lorsque le vice affecte une partie privative, par exemple, un élément d'équipement de l'appartement loué mais que le dysfonctionnement de la chaudière a pour origine un vice affectant une partie commune de l'immeuble, il y a lieu de retenir la responsabilité du copropriétaire bailleur tenu, envers le preneur, par son obligation contractuelle d'assurer l'occupation paisible des lieux loués.
Enfin, il faut savoir que les clauses exonératoires de responsabilité sont valables car l'article 1721 du Code civil n'est pas d'ordre public.
La clause doit être expresse et non équivoque. Les juges interprètent strictement les clauses.
Cependant, la clause "d'acceptation des lieux en l'état" n'exclut pas la garantie pour vices cachés.
La Cour de Cassation a , à plusieurs reprises, rappellé que "l'acceptation des lieux en l'état ne décharge pas le bailleur de son obligation de délivrance". (Cass. 3e civ., 2 févr. 2010, n° 09-12.691, F-D, Llobet c/ Sté la Brisange Pami (pourvoi c/ CA Montpellier, 1re ch., sect. B, 17 juin 2008) : JurisData n° 2010-051470).
Cette solution indique que même si le locataire a connaissance, dès le départ des désordres affectant le local loué et qui sont listés dans l'état des lieux, il n'est pas pour autant privé du droit de recherhcer la responsabilité de son bailleur.
Rappellons que l'obligation de délivrance ne se limite pas à mettre un local à disposition, mais elle doit aussi permettre au locataire une utilisation du bien conforme aux prévisions contractuelles.
Si la jouissance du locataire est privé par l'impossibilité d'utiliser les locaux des l'origine ou du fait que des travaux doient être envisagés, le bailleur devra assumer la responsabilité nonobstant l'existence d'une clause du bail le déchargeant de toute responsabilité.
Cette jurisprudence s'inscrit dans la protecion du locatire et peut être invoqué tant dans le cadre d 'un bail commercial que d'un bail habitation.
Cabinet Maître Joan DRAY
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