L’obligation d’information annuelle des cautions

Publié le 07/12/2011 Vu 66 138 fois 8
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Dans un souci de protéger la personne physique ou morale qui s’est portée caution au titre d’un acte de cautionnement, la loi du 1er mars 1984 est venue imposer aux établissements de crédit une obligation d’information annuelle des cautions. A ce titre, les établissements de crédit sont tenus de renseigner annuellement les cautions sur l’engagement qu’ils ont souscrit et sur le montant restant dû par ces dernières en principal, intérêts, frais et accessoires. Néanmoins, ceux-ci ne s’acquittent pas toujours de cette obligation qui leur incombe. Quelles sont alors les règles applicables en matière de preuve, sanction en cas de non respect de cette obligation par l’établissement de crédit? La jurisprudence est venue préciser l'étendue de cette obligation à la charge es établissements bancaires.

Dans un souci de protéger la personne physique ou morale qui s’est portée caution au titre d’un acte de

L’obligation d’information annuelle des cautions

Dans un souci de protéger la personne physique ou morale qui s’est portée caution au titre d’un acte de cautionnement, la loi du 1er mars 1984 est venue imposer aux établissements de crédit une obligation d’information annuelle des cautions.

A ce titre, les établissements de crédit sont tenus de renseigner annuellement les cautions sur l’engagement qu’ils ont souscrit et sur le montant restant dû par ces dernières en principal, intérêts, frais et accessoires.

Néanmoins, ceux-ci ne s’acquittent pas toujours de cette obligation qui leur incombe.

Quelles sont alors les règles applicables en matière de preuve, sanction en cas de non respect de cette obligation par l’établissement de crédit?

C’est l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier qui prévoit cette obligation d’information.

Celui-ci dispose que « les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution ainsi que le terme de cet engagement.

Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information».

L'alinéa 2 de l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier a été complété par la formule suivante « les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette» (L. no 99-532, 25 juin 1999, art. 114; C. mon. fin., art. L. 313-22).

Dans un arrêt récent rendu le 11 octobre 2011, les juges ont eu à se prononcer sur cette obligation d’information annuelle imposée aux établissements de crédit et qui appelle donc les banques à la vigilance.

En l’espèce, la Banque populaire du Nord a consenti deux prêts professionnels à la société Opaline dont la gérante, Mme X..., s'est rendue caution solidaire.

A la suite de la liquidation judiciaire de cette société, Mme X... a été assignée par la banque en exécution de ses engagements.

La Chambre commerciale de la Cour de Cassation a estimé que lorsqu’une personne caution est condamnée à exécuter son engagement, l’établissement de crédit est tenu de respecter certaines obligations et notamment celle relative à l’information annuelle des cautions jusqu’à l’extinction de la dette garantie (Cass. com. 11 octobre 2011, pourvoi n° 10-25862).

Cela signifie donc que même si l'entreprise cliente de la Banque fait l'objet d'une liquidation judiciaire, la Banque demeure, malgré tout tenue de continuer à adresser chaque année une lettre d'information à la caution et de pouvoir en justifier.

Les établissements de crédit ayant accordé à une entreprise un concours financier sous la condition d’un cautionnement doivent donc se conformer aux prescriptions de l’article L313-22 jusqu’à l’extinction de la dette garantie.

Un jugement définitif condamnant une caution à exécuter son engagement ne les relève pas de certaines de leurs obligations.

La preuve de l’information annuelle

La jurisprudence prévoit que le créancier est tenu de démontrer qu'il a bien exécuté son devoir d'information. Cette preuve peut être apportée par tous moyens (Cass. com., 17 juin 1997 : JCP E 1997, II, 1007, note D. Legeais).

Le créancier doit démontrer que le document adressé à la caution contenait bien les informations exigées.

La Cour de cassation considère, en effet, qu’ « il n'incombe pas à l'établissement de crédit de prouver que la caution a effectivement reçu l'information envoyée » (Cass. 1re civ., 25 nov. 1995).

Par arrêt du 26 octobre 1999, la Cour de cassation a jugé que l'établissement de crédit n'avait pas à prouver l'envoi de la lettre d'information si aucun élément ne permettait d'en douter (Cass. com., 26 oct. 1999 : JCP G 2000, I, 257, n° 8, obs. Ph. Simler).

L’article 1315 alinéa 2 du Code civil exige que le débiteur de l'information c’est à dire l’établissement bancaire rapporte une double preuve : celle de l'envoi et celle du contenu de l'information.

L’information n’est soumise à aucun formalisme particulier.

Cela signifie donc que l'information peut être donnée par simple lettre.

Sanctions applicables en cas de non respect de l’obligation

La conséquence du non respect de cette obligation imposée aux établissements de crédit est la suivante : ceux-ci se retrouvent privés du droit de réclamer les intérêts à la caution depuis la précédente information jusqu'à la communication de la nouvelle information.

En l'absence d'information, la déchéance prend donc effet non à la date de l'engagement de la caution, mais à celle où l'information aurait dû être donnée pour la première fois, donc au 31 Mars suivant la date de l'engagement (Cass. com., 6 juin 1995, n° 93-15.242 : Juris-Data n° 1995-004278).

La déchéance prend effectivement fin dès lors que l'information légale est fournie.

En l'absence de justification de l'information donnée aux cautions par application de l'article L 313-22 du Code monétaire et financier, la déchéance est strictement circonscrite aux intérêts au taux conventionnel.

La déchéance ne s'applique, conformément à la lettre du texte, qu'aux seuls intérêts, et non à d'autres accessoires de la dette, tels que des commissions (CA Paris, 24 avr. 1998 : Juris-Data n° 1998-021555).

Aucune déchéance n'est encourue pour les intérêts légaux ayant commencé à courir à compter de la mise en demeure de la caution.

Joan DRAY
Avocat à la Cour
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1 Publié par Visiteur
21/05/2012 12:03

Exposé trés clair et didactique. Merci

2 Publié par Visiteur
18/11/2015 10:02

Bonjour,

puisqu'il n'incombe pas à l'établissement de crédit de prouver que la caution a effectivement reçu l'information envoyée, il suffit, pour l'établissement de crédit, et en toute mauvaise fois, de produire au Tribunal les lettres d'informations annuelles qu'elle n'a jamais envoyées. Encore un grand vide juridique!

3 Publié par Visiteur
25/04/2016 08:25

Bonjour,
Merci de vos explications, mais y a t-il un tarif précis pour cette information caution ou c'est l'établissement qui détermine son tarif ?

4 Publié par Visiteur
07/07/2016 01:40

Bonjour à tous,
Qu'en ai t'il de l'obligation d'informations des cautions pour une banque qui possède un arrêt définitif ? Doit elle continuer son information jusqu'a extinction de dette ? est ce qu'il y a des jurisprudence sur la question ?
Merci de votre réponse
Cordialement
Olivier

5 Publié par Visiteur
12/09/2016 10:28

Bonjour!

Pour revenir à la préoccupation de M. Olivier, je me pose la question de savoir si la condamnation définitive d'une caution n'équivaudrait pas à l'extinction du contrat de cautionnement puisque la caution est dès lors devenue le débiteur bien qu'elle possède une action récursoire envers le débiteur principal.
J'ai lu un arrêt de la Cour d'appel de Caen du 6 janvier 2004 qui retenait que "l’obligation d’information, codifiée à l’article L. 313-22 du code monétaire et financier à la charge du créancier ne saurait perdurer au prononcé d’une décision de justice, et de plus fort, lorsque celle-ci est devenue définitive" alors que
"la jurisprudence a admis que, ni la mise en demeure ou l’assignation, ni l’ouverture de la procédure collective du débiteur principal ne suspendait ou n’éteignait cette obligation (com., 25 avril 2001, note Legeais D., RD bancaire, 2001, n° 4, p. 251-253), ou encore, qu’en cas de décès de la caution, cette dernière survivrait à l’égard de ses héritiers (com., 9 déc. 1997, Bull. n° 323)".

Ma préoccupation est donc de savoir si l'information de la caution perdure alors même que ladite caution ne remplit même plus ce rôle vis à vis du débiteur principal qui devient de facto (après paiement bien entendu) le débiteur de l'ancienne caution par voie de subrogation dans les droits du créancier poursuivant.

6 Publié par Visiteur
02/10/2016 05:57

Bonjour!

j'ai encore une préoccupation par rapport à l'information de caution nonobstant sa condamnation définitive.

Comment le créancier pourrait-t-il respecter l’obligation d’information après la condamnation définitive de la caution sans encourager ladite caution à payer sa dette au cours des années suivantes ?

En effet, l’information de la caution en France étant annuelle, le juge semblerait prévoir l’insolvabilité de la caution durant la période qui s'étendrait du prononcé de la condamnation définitive de la caution jusqu'au paiement de la dette, ce qui est une mauvaise nouvelle pour les créanciers.

Quid du pouvoir coercitif du droit ?

7 Publié par Visiteur
28/01/2017 02:22

Bonjour !

Je voudrais vous poser une question. Nous savons qu'en cas de mise en demeure de payer adressée à la caution, certes les intérêts moratoires commencent à courir et l'obligation d'information de la caution subsiste. Mais, je me demande si la lettre d’information de la caution devrait contenir le calcul des intérêts moratoires au taux légal, en plus des intérêts au taux conventionnel à peine de sanction pour information incomplète.

8 Publié par Visiteur
12/04/2018 17:06

bonjour
ma banque me prélève 208€ pour m'informer de la dite caution ! est-ce normal ce montant que je trouve exorbitant ?

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