Si en principe, le débiteur doit s’acquitter des sommes mise à sa charge par un jugement de condamnation, il se peut que ce dernier soit, compte tenu de sa situation, dans l’impossibilité de s’exécuter.
Dans un tel cas, le débiteur peut solliciter du juge des délais de paiement. Â
En effet, l’article 1244-1 du Code civil dispose que « compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues ».
L’octroie de délai de paiement a pour effet d’interdire tout acte d’exécution à l’encontre des biens du débiteur. Toutefois, il ne fait pas obstacle aux mesures conservatoires. Ainsi, le créancier demeure en droit de prendre toutes mesures propres à sauvegarder ses intérêts.
Cet article a pour objet de rappeler les conditions d’octroi des délais de paiement (1) ainsi que de préciser les particularités de la décision du juge en la matière (2).
 1/ Les conditions d’octroi des délais de paiement :
Tous les débiteurs ne sont pas en droit d’obtenir des délais de paiement.
Ainsi, il résulte tant de la loi que de la jurisprudence que seul le débiteur malheureux et de bonne foi peut prétendre obtenir de tels délais.
Le débiteur malheureux est celui qui a des difficultés réelles du fait de circonstances indépendantes de sa volonté ; celles-ci ne lui permettent pas de se libérer immédiatement (Cass. Com 30 avril 1968: Bull civ III n° 213).
Tel est le cas, par exemple, d'une personne âgée percevant une faible retraite et titulaire d'une carte d'invalidité (CA Orléans 5 mai 1992 : JurisData n° 043085) ou d’une personne en divorce justifiant d'une situation financière critique (CA Versailles 6 juin 1989 : JurisData n° 045730). Â
En revanche, les délais de paiement seront refusé au débiteur dont les revenus sont corrects et qui entretient un bateau et trois voitures (CA Orléans 18 mars 1997 : JurisData n°040231). Â
Le débiteur de bonne foi est celui qui a démontré, par son attitude, qu'il désirait se libérer, en faisant son possible pour améliorer sa situation.
Tel sera le cas du preneur auquel est reproché un défaut d'exploitation et qui a régularisé sa situation administrative (CA Paris 27 mai 1992 : JurisData n° 021366)  ou de celui qui a réalisé son patrimoine immobilier pour régler son dû (CA Orléans 9 octobre 1990 : JurisData n° 050830).
En revanche, le débiteur qui a abusivement tardé à régler sera considéré comme de mauvaise foi (CA Montpellier 30 mai 1990 : JurisData n° 001861). Â
Il en est de même du débiteur qui malgré une exécution provisoire ne règle rien et ne fait aucune proposition de paiement (CA Limoges 13 février 1997 : JurisData n° 042439).
En règle générale, les juridictions considèrent enfin qu'il faut que le débiteur soit encore in bonis, estimant que, s'il ne possède plus rien, sa demande est sans objet.
Par ailleurs, il convient de noter qu’il existe des textes qui prévoient l'octroi de délais de grâce.
Ainsi, en vertu de l’article L145-41 du Code de commerce, le juge peut suspendre les effets de la clause résolutoire prévue dans un bail commercial. Â
A l’inverse, il est des domaines où l’octroie de délais de grâce est interdit.
A cet égard, l’article 1244-1 du Code civil interdit, par exemple, tout délai de grâce en matière de dettes alimentaires.
De même, l’article L613-1 du Code de la construction et d l’habitation prévoit que le locataire expulsé ne peut en obtenir lorsque le bailleur qui ne peut se loger reprend les lieux pour les habiter.
2/ La décision du juge :
Les juges disposent, en la matière, d’un pouvoir souverain pour l’accorder ou le refuser.
Toutefois, leur liberté n'est pas totale. Ils doivent, en effet, motiver leur décision et le débiteur qui s’est vu refusé des délais de paiement dispose d’une voie de recours contre cette décision.
En outre, dans certains cas, la loi interdit au juge d’octroyer des délais de paiement (art 512 CPC).
Tel est le cas lorsque les biens du débiteur sont saisis par d’autres créanciers.
Il faut assimiler à cette hypothèse celle de la déconfiture du débiteur c'est-à -dire le cas où il n'est plus susceptible de remplir ses engagements alors même qu'il n'est ni soumis à une procédure collective ni encore saisi par les créanciers mais seulement objet de leur mise en demeure.
Enfin, il est interdit au juge d’octroyer des délais au débiteur qui est mise en liquidation judiciaire. Cette solution résulte de l’article 622 du Code de commerce qui dispose que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend toutes les créances exigibles. Dès lors, le le débiteur perd le bénéfice du délai de grâce qui aurait pu lui être accordé et ne peut évidemment en obtenir un s'il ne l'avait pas encore.
Pour conclure, il convient de rappeler que le délai de grâce court à compter du jugement l’accordant lorsque celui-ci est contradictoire et du jour de sa notification lorsqu’il ne l’est pas (art 511 CPC).
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Joan DRAY
Avocat à la Cour
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