La liquidation judiciaire de la société du dirigeant caution comme moyen de défense contre la banque

Publié le Modifié le 29/03/2017 Vu 111 454 fois 158
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Suite au prononcé de la liquidation judiciaire de sa société, quelles dettes sociales le dirigeant caution est-il tenu de payer en exécution de ses engagements de garantie tel qu'un cautionnement ?

Suite au prononcé de la liquidation judiciaire de sa société, quelles dettes sociales le dirigeant caution

La liquidation judiciaire de la société du dirigeant caution comme moyen de défense contre la banque

Un dirigeant ou une société peut être amené à souscrire des contrats de crédit ou obtenir des autorisations de découvert auprès d’établissements bancaires pour exercer et développer leur activité commerciale (achat de fonds de commerce, de parts sociales, de locaux commerciaux, financement de besoin de trésorerie en compte courant, etc ...).

Le cas échéant, le dirigeant doit souvent garantir à titres personnel et solidaire le paiement des dettes de la société qu'il dirige, et ce notamment au moyen d’un acte de cautionnement.

Or, cet engagement bancaire consistant à garantir de ses deniers le payement de la dette sociale en cas d’incapacité financière de la société est risqué financièrement pour le dirigeant caution ou ceux qui s'engagent en tant que telle à ses côtés.

En effet, le cautionnement donné par le dirigeant peut être mis en œuvre suite au redressement et/ou à la liquidation judiciaires de sa société et l’obliger personnellement au paiement de sommes parfois très importantes.

Cependant, selon la jurisprudence, les personnes qui se sont portées caution doivent savoir qu'il existe de nombreux arguments permettant de faire annuler leur engagement.

Aussi, le 4 novembre 2014, la Cour de cassation a refusé de condamner un dirigeant caution au paiement de la totalité de la dette sociale réclamée par l’établissement bancaire (Cass, Com, 4 novembre 2014, n°12-35357).

En l’espèce, une société avait conclu plusieurs contrats de prêt auprès d'une caisse du Crédit Agricole.

Or, la société a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires.

Dans ce contexte, la banque a déclaré sa créance à hauteur de 359.175, 62 euros et a assigné à ce titre le dirigeant caution solidaire de la société en exécution de ses cautionnements.

Alors que la Cour d’appel a condamné le dirigeant caution au paiement de la créance déclarée, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel en jugeant que :

  • d’une part, « (…) en l’absence d’une clause contraire, dont l’existence n’était pas alléguée en l’espèce, la déchéance du terme résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal n’avait d’effet qu’à l’égard de celui-ci et était sans incidence sur la situation de la caution poursuivie en paiement, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».  
  • d’autre part, « (…) sans rechercher si ces créances étaient échues le (jour de l’ouverture du redressement judiciaire), la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».

Autrement dit, si le prononcé de la liquidation judiciaire entraîne l’obligation de payer immédiatement et en sa totalité la dette sociale, à défaut de clause contraire, cette exigibilité de la dette sociale est uniquement opposable à la société débiteur principal et non au dirigeant caution.

En effet, en cas d’appel en garantie, le dirigeant caution est seulement tenu au paiement des dettes exigibles, c’est-à-dire impayées au jour de l’ouverture du redressement judiciaire de sa société, mais encore faut-il que les éléments de preuve produits par la banque soit exempts de critique. 

Pour mémoire, l’article 2290 du code civil dispose que :

« Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses.

Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses.

Le cautionnement qui excède la dette, ou qui est contracté sous des conditions plus onéreuses, n'est point nul : il est seulement réductible à la mesure de l'obligation principale. »

En outre, selon l’article L. 622-22, alinéa 1er, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, aujourd’hui repris à l’article L.643-1 du même code :

« Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues ».

En l’espèce, en se fondant sur les mêmes textes, la Haute Cour a rappelé les principes selon lesquels :

  • le jugement qui prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances qui n'étaient pas échues à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire ;
  • la déchéance du terme convenu, résultant du prononcé de la liquidation judiciaire du débiteur principal, n'a d'effet qu'à l'égard de celui-ci et ne peut pas être étendue à la caution, à défaut de clause contraire.

Ainsi, concrètement, la banque doit établir et justifier à la caution le montant de la somme due par la société sans pouvoir utilement invoquer une déclaration de créances établie dans le cadre de la procédure collective de la société pour s'y référer.

L'analyse des documents produits par la banque peut permettre de découvrir des problèmes de décompte de la créance et que le montant de la somme demandée en paiement n'est pas justifiée.

Au cas d'espèce, grâce à cet argument, le dirigeant caution n’a donc pas été condamné au paiement de la totalité de la créance réclamée par la banque initialement.

Par conséquent, grâce aux règles propres aux procédures collectives, le dirigeant caution peut s’opposer valablement, le cas échéant, à une demande en paiement de la banque d’un montant supérieur à celui de la dette sociale qu’il doit garantir en exécution de ses engagements.

NB : Afin d'approfondir le sujet des moyens de défense dont disposent les cautions poursuivies en paiement par la banque, je vous invite à lire mon article publié ICI.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
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1 Publié par Visiteur
23/06/2016 16:37

Caution solidaire d'un prèt sur une SARL
a titre personnel.
Solde restant du 84 000 euros(produit par la banque)
Dépot de bilan de la St en avril 2009
Plan accepté en octobre 2010
Liquidation de la ST en janvier 2015
Assignation de la banque sur la caution en avril 2016
La banque assigne 5 ans et six mois après le
dépot de bilan et sa production .
La prescription de 5 ans semble ètre de mise

Mais on me dit qu'une nouvelle pèriode de 5 ans
pour aboutir avant la prescription aurait démarré
lors de la mise en liquidation en janvier 2015

La banque a eu plus de 5 années pour signifier
elle ne l'a pas fait
La nouvelle pèriode de 5 ans qui démarrerait au
moment de la liquidation est elle réelle?

PIERRE LENNE
06 09 44 39 49
p.lenne.emrindustrie@orange.fr

2 Publié par Visiteur
30/06/2016 04:34

Bonjour Maître,
Ma société SARL a été mise en liquidation en juin 2015 et clôturé par le tribunal le 2/12/2015 toutes mes dettes ont étés épurés sauf celle de la banque ou j était caution solidaire de 2 prêt 3500€ et 15000€ la banque me réclame par huissier la sommes de 27000€ qui correspond au deux prêt ainsi qu au découvre restant de 5500€ celui ne devait il pas être dans mon passif? Et dois je rembourser ses prêt ?? A savoir aujourd hui j ai une autre entreprise qui existe depuis 2013 , l huissier a t il le droit de saisir mon autre société ?? Qui n a aucun lien avec la première mais dont je suis gérante ? Merci pour vos réponses.. A savoir je n ai jamais reçu de lettre recommander concernant la réclamation du remboursement de ces prêts?

3 Publié par Maitre Anthony Bem
30/06/2016 05:34

Bonjour Lenne Pierrre,

La déclaration de la créance au passif de la liquidation judiciaire du débiteur principal par la banque interrompt en effet le délai de la prescription de 5 ans à l'égard de la caution solidaire.

Cet effet interruptif se prolonge jusqu'à la clôture de la liquidation de la société débitrice.

Je vous confirme donc que le délai de prescription est interrompu à l'égard de la caution jusqu'à la clôture de la procédure collective.

Cordialement.

4 Publié par Maitre Anthony Bem
30/06/2016 05:40

Bonjour Floranice,

Je vous confirme que toutes vos dettes bancaires, dues au titre de vos prêts de sociétés, devaient être déclarées par la banque dans le cadre du passif de votre société.

Il vous faudrait me consulter en privé pour savoir s'il faut ou non rembourser ces prêts.

En tout état de cause, l'huissier n'a pas le droit de saisir votre autre société qui n'a aucun lien avec la première, même si vous en êtes la gérante.

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
30/06/2016 15:06

Bonjour

Ce n'est peut-ètre pas aussi simple.
La déclaration de la créance au passif du redressement Judiciaire intérromp le délais de prescription jusqu'a la fin de la procédure en l'occurence jusqu'a l'acceptation du plan

Après l'acceptation du plan la banque a mis 5 ans et 6 mois pour assigner la caution
Mais la St a été mise en liquidation avant la fin du plan

Cette mise en liquidation ouvre une nouvelle pèriode pendant laquelle la ST ne peut pas ètre attaquée ,mais la caution continue a pouvoir l'ètre

Cette nouvelle pèriode qui s'ouvre ferait repartir le temps a 0 et donc pour 5 ans pour assigner la caution.
Alors mème qu'un délais de plus de 5 ans a déja été traversé pendant lequel la banque pouvait assigner

Dans ces conditions la prescription est'elle acquise pour la caution
P LENNE
06 09 44 39 49

6 Publié par Maitre Anthony Bem
01/07/2016 22:15

Bonjour LENNE PIERRE,

Je vous confirme que :

- la déclaration de créance de la banque au passif de la société en redressement judiciaire intérromp le délai de prescription de l'action en paiement de la banque contre la caution

- l'acceptation du plan est le point de départ de la préscription de l'action en paiement de la banque pour assigner la caution.

- lorsque la société débitrice est mise en liquidation avant la fin du plan, celle-ci ouvre un nouveau délai de 5 ans pendant lequel la caution peut être assignée en paiement.

Je ne puis vous indiquer si dans votre cas la prescription est acquise ou non pour la caution dans l'ignorance de la chronologie des faits.

Afin de me permettre de prendre connaissance de votre situation personnelle en détail et de disposer de toutes les informations nécessaires pour vous répondre en toute connaissance de cause, je vous propose de me contacter en privé pour une consultation.

A cet égard, je vous invite à choisir l'une de mes différentes modalités de consultation en cliquant sur "services" en haut de cette page.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
04/07/2016 08:38

Merci Maitre de ces renseignements

Nous sommes exactement dans cette situation :

RJ AVRIL 2009
PLAN OCTOBRE 2010
LIQUIDATION JANVIER 2015

Donc pendant le plan mise en Liquidation
et ouverture de cette nouvelle pèriode de5 ans que vous décrivez.
Nouvelle pèriode ou les créanciers continuent a ne pas pouvoir agir ,mais ou la caution redémarre 5 anneés avant la prescription

Ce que je ne trouve pas dans les textes ,c'est la règle ou l'article qui dit qu'une une nouvelle pèriode de 5 ans s'ouvre après liquidation

S'il y a liquidation immédiate , et non RJ il est clair qu'une pèriode de 5 ans s'ouvre
Mais la liquidation pendant le plan fait suite a une pèriode pendant laquelle la banque pouvait actionner .
Nous serions donc pour la banque dans une pèriode de 5 ans plus la pèriode du plan déja parcourue

En l'espèce la banque aura eu en continu 4 ans plus deux mois plus 5 ans de possibilité d'agire

C'est la que je doute et notamment concernant la modification de la loi en 2008 qui avait pour but de raccourcir les délais d'action
Merci
PL

8 Publié par Visiteur
08/07/2016 11:14

Merci de me transmettre votre commentaire SVP
PIERRE LENNE

9 Publié par Visiteur
12/07/2016 16:04

Pour illustrer encore ma thèse.

Imaginons un scénario ou la ST obtient son plan en octobre 2010 et ou elle serait liquidée en janvier 2018 donc encore pendant le plan.(10 ans de plan)
La prescription serait actée a compter d' octobre 2015 et 3 ans après une nouvelle période de 5 ans débute pour prescrire ce qui l'est déja depuis 3 ans

Merci de vos observations
p lenne 06 09 44 39 49

10 Publié par Visiteur
21/07/2016 16:37

Bonjour
Pouvez vous me faire un commentaire??
PL

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