Le dol en droit des contrats :
Le contrat est un acte juridique bilatéral c'est-à-dire qu’il faut qu’au moins deux volontés se manifestent pour que des effets juridiques se produisent. C'est une sorte de convention car il sert à créer un droit.
D'après l'article 1108 du Code Civil, pour que ce contrat soit valablement formé, quatre conditions sont nécessaires.
Il faut tout d'abord que les parties donnent leur consentement. Il est nécessaire également que ces parties aient la capacité de contracter. Il faut aussi un objet certain. Et enfin une cause licite.
Par ailleurs, l'article 1109 du Code Civil énonce « qu'il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol. ».
Aussi l’article 1116 du Code civil sanctionne-t-il le dol en tant que vice du consentement par la nullité du contrat.
Cet article a pour objet de rappeler les éléments constitutifs du dol avant de voir les recours de la victime
1 / Les éléments constitutifs du dol :
Le dol est un acte de déloyauté provoquant une erreur du cocontractant l’ayant déterminé à conclure un contrat et il doit être à l’origine d’une erreur provoquée (article 1116 du Code civil).
- La nécessité d’une erreur provoquée :
Contrairement à l’erreur, en matière de dol, toutes les erreurs sont admises.
Ainsi, l’erreur sur la valeur qui n’est pas sanctionnée sur le fondement de l’erreur (art 1110 C civ) peut être sanctionnée sur le terrain du dol dès lors cette erreur résulte d’une manœuvre émanant du cocontractant.
De même, en matière de dol, l’erreur est toujours excusable (Cass Civ 3ème 21 février 2011).
- Une manœuvre émanant du cocontractant:
Il peut s’agir d’un stratagème c'est-à-dire que le cocontractant va organiser la situation pour faire croire quelque chose qui n’existe pas afin d’amener l’autre à contracter.
De même, il peut s’agir d’un mensonge.
Ainsi, récemment, la Cour de cassation dans des arrêts de 2010 a considéré que le fait de mentir dans le cadre d’une vente en affirmant que les normes de sécurité étaient respectées alors que le vendeur savait très bien que ce n’était pas le cas constitue un mensonge susceptible d’entrainer l’annulation sur le fondement du dol.
Par ailleurs, la Cour de cassation, depuis 1971, a étendu la notion de dol en admettant que la réticence dolosive puisse constituée une manœuvre permettant d’obtenir la nullité du contrat sur le fondement de l’art 1116 du Code civil.
En fait, la réticence dolosive n’est rien d’autre que la traduction d’un comportement de mauvaise foi dans le cadre de la formation du contrat.
La Cour de Cassation a jugé dans un arrêt du 7 juin 2011 "qu 'une demande indemnitaire, exclusivement fondée sur la réticence dolosive reprochée au La cédant d'un fonds de commerce, ne peut être accueillie si le cessionnaire n'établit pas le caractère intentionnel du comportement du cédant et le caractère déterminant du dol allégué, lesquels sont souverainement appréciés par les juges du fond".
Ainsi, la Cour de Cassation ajugé dans una rrêt du 3 mars 2010 que "Le fait de ne pas avoir informé un acquéreur du fait que la maison acquise avait été inondée constitue une réticence dolosive justifiant l’annulation de la vente."
Dès lors qu’une personne connaît une information d’importance pour l’autre et la cache, ne dit rien, suffit à caractériser la réticence dolosive et par la même le dol.
Néanmoins, aujourd’hui, il semble que la Cour de cassation fonde cette solution en s’appuyant sur le non respect d’une obligation pré contractuelle d’information.
Dès lors, le silence de la partie ne saura sanctionner que s’il pesait sur elle une obligation d’information.
Aussi, la Cour de cassation a-t-elle jugé dans un arrêt du 3 mai 2000 dite de l’affaire Baldus qu’aucune obligation d’information ne pesant sur l’acheteur le vendeur ne pouvait agir en nullité de la vente au motif que l’acheteur aurait gardé le silence sur la valeur réelle des photographies.
Enfin, il convient de préciser que la manœuvre doit émaner du cocontractant. Le dol émanant d’un tiers n’est pas, en principe, sanctionné.
- Une manœuvre intentionnelle :
Le dol est une faute délictuelle qui repose sur un élément intentionnel mais pas nécessairement une intention de nuire à son cocontractant.
Il s’agit ici de vérifier que le cocontractant l’a fait en connaissance de cause, que l’auteur de la manœuvré savait qu’en ayant cette manœuvre l’autre allait conclure et que sans cette manœuvre il ne l’aurait pas fait.
Aussi, la Cour de cassation dans un arrêt du 19 mars 2008 rappelle cette exigence en énonçant que si l’élément intentionnel n’est pas rapporté, les juges ne peuvent admettre l’existence d’un dol (Cass civ 1ère 19 mars 2008).
2/ Les sanctions :
- La nullité relative du contrat :
La nullité étant relative seule la victime du dol peut agir à défaut de toute autre personne.
En application de l’article 1304 du Code civil, l’action en nullité relative se prescrit, en principe par 5 ans à compter de la découverte du vice pour agir.
- La responsabilité civile :
Le dol constitue aussi un délit civil et en conséquence, il constitue une faute au sens de l’article 1 382 du Code civil.
Dès lors, la victime est en droit de demander l’allocation de dommages intérêts.
Il convient de préciser qu’en cas de dol principal c'est-à-dire un dol qui aurait déterminé la victime à contracter, cette dernière dispose d’une option entre demander la nullité du contrat et engager la responsabilité délictuelle.
En revanche, le dol incident qui n’est pas suffisamment déterminant du consentement ne sera sanctionné que comme une faute délictuelle et en conséquence ne pourra engager que la responsabilité de son auteur sur le fondement de l’article 1 382 du code civil.
A cet égard, la Cour de cassation a précisé que si la victime d'un dol dans la formation du contrat peut demander l'annulation de celui-ci, elle peut aussi se contenter de réclamer des dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice causé par le dol, qui est en lui-même constitutif d'une faute (Cass Civ 1ère 25 juin 2008).
L’action en responsabilité doit être intentée, selon la nature du préjudice dans un délai de 5 ans ou 10 ans.
Enfin, comme l’a rappelé la cour de cassation dans un arrêt du 7 juin 2011, le dol ne se présume pas.
Dès lors, la victime doit apportée la preuve de l’intention de son cocontractant de la tromper (Cass. com., 7 juin 2011, n° 10-13.622, FS-P+B, sté Pharmacie Y c/ X : JurisData n° 2011-010920).
Ce principe doit être nuancé car la Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 15 mai 2002 en matière de contrat de vente que la mauvaise foi du vendeur professionnel dès lors que l’acheteur est un profane (Cass Civ 1ère 15 mai 2002). .
Dès lors que le professionnel manque à son obligation d’information, le caractère intentionnel est présumé et donc son cocontractant n’aura pas à le prouver.
Joan DRAY
Avocat à la Cour
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