Au cours d’un bail commercial, les parties peuvent décider librement d’un commun accord de rompre leurs relations contractuelles.
Le bailleur et le locataire peuvent s’entendre pour rompre la bail, ce qui permet au bailleur de reprendre possession de son bien rapidement et au locataire de ne plus payer les loyers et charges jusqu’au terme de la période triennale en échange d’une libération des lieux.
Cette résiliation est soumise à un formalisme, puisque l’exigence d’un écrit est nécessaire.
Dans la pratique, les parties prendront la précaution de rédiger en des termes clairs les modalités de cette résiliation amiable.
Cet article vise à mettre en lumière le principe de la résiliation amiable du bail commercial, ainsi que ses principaux mécanismes.
Le principe d’admission de la résiliation amiable
L’article 1134 du Code civil dispose :
« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi. »
C’est à l’appui de cet article 1134 que la jurisprudence admet la résiliation amiable anticipée du bail commercial.
La Cour de cassation rappelle, dans un arrêt du 14 novembre 2007, qu’il est préférable d’accorder de l’importance à cet acte de résiliation amiable, en ce qu’il peut constituer une preuve en procédure.
Le locataire ne pourra quitter les lieux qu’après notification et acceptation de l’acte par le bailleur.
Dans le cas contraire, son départ pourrait constituer une faute contractuelle.
La résiliation amiable soumise à condition
Il arrive cependant que la résiliation amiable du bail commercial soit admise par les parties contractantes, mais qu’elle soit également assortie de conditions :
Le bailleur peut accepter la résiliation à condition que le locataire lui verse une indemnité de résiliation ou inversement ou tout simplement un nouveau locataire qui lui succédera dans la location.
Il faut tout de même noter que dans ce dernier cas, le locataire doit être assez prudent dans la mesure où il est confronté à l’autonomie de volonté du bailleur qui peut aisément refuser le successeur soumis ou même modifier les conditions du contrat de bail.
Dans un cas où un bailleur avait refusé de signer avec le successeur présenté par son locataire un nouveau bail aux clauses et conditions de l'ancien, a été censurée la décision d'une cour d'appel qui, sans caractériser la faute commise par le bailleur, avait jugé que ce refus procédait d'un manquement du bailleur à ses engagements envers son locataire (Cass. 3e civ. 14 novembre 2007 n° 06-15.544 FS-PB, de Caffarelli c/ Sté film par Film : RJDA 4/08 n° 380).
La Cour de cassation admet l’abus de droit, même si ce dernier est très difficile à prouver.
La substitution du bail commercial par un autre contrat
La résiliation amiable du bail commercial ne signifie pas automatiquement la rupture définitive du lien contractuel entre le bailleur et son locataire. Il est possible que les deux parties conviennent d’un nouveau contrat de bail après résiliation du premier, afin de repartir sur « de nouvelles bases ».
Cette substitution n’est pas forcément profitable au locataire de la même manière que le bailleur : la restitution des lieux n’est pas exigée, tout comme un nouveau dépôt de garantie par exemple.
Mais toute modification du local apportée par le locataire sera prise en compte pour la réévaluation du loyer mensuel (Cass.com 14 mars 2008).
La résiliation amiable du bail commercial est possible même si le bailleur peut la tourner à son avantage. Le locataire devra être prudent lors de la procédure de résiliation, et notamment à ne pas quitter les lieux avant que l’acte de résiliation ne soit rédigé.
Quoiqu’il en soit, il est impératif pour le locataire de recourir à un acte de résiliation amiable pour éviter tout conflit avec son bailleur.
La notification au créancier inscrit de l’acte de résiliation amiable
Le bailleur qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel est exploité un fonds de commerce grevé d'inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile élu par eux dans leurs inscriptions (C. com. art. L 143-2).
Ainsi même dans le cas d’une résiliation amiable, l’exigence d’une notification aux créanciers inscrits s’impose car il est évident que cela a pour d’éviter les fraudes et de protéger les créanciers qui disposent d’une sureté sur le fonds de commerce.
La notification vaut mise en demeure d'exécuter les clauses du bail (Cass. 3e civ. 8 février 1989 n° 87-11.919, Sté Soficim c/ Coche : Bull. civ. III n° 31).
Elle a pour but de réserver aux créanciers inscrits un moyen de sauvegarder leur gage, dont le bail est un des principaux éléments, en leur permettant d'accomplir les obligations nées du bail au lieu et place de leur débiteur (Cass. 3e civ. 13 avril 1976 n° 74-11.774, Lamy c/ Coffy : Bull. civ. III n° 151 ; Cass. 3e civ. 17 mai 1977 n° 75-14.976, Gay c/ Arnaud : Bull. civ. III n° 215).
Les créanciers destinataires de la notification sont l'ensemble des créanciers ayant requis l'inscription d'un privilège ou d'un nantissement sur le fonds de commerce.
En revanche, le créancier bénéficiaire d'une inscription provisoire de nantissement sur un fonds de commerce ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article L 143-2 du Code de commerce s'il n'a pas procédé à une inscription complémentaire dans les deux mois à compter du jour où la décision constatant la créance a acquis l'autorité de la chose jugée ; en effet, dans ce cas, l'inscription provisoire est devenue rétroactivement sans effet (Cass. 3e civ. 6 décembre 1995 n° 2210 P, Nahabedian c/ Flexas Vich : RJDA 2/96 n° 191, 3e espèce).
Le créancier doit s'être inscrit avant que la résiliation du bail commercial soit devenue effective.
L'antériorité s'apprécie en cas de résiliation amiable, l'inscription doit être antérieure à la date de l’accord.
Cette formalité exige du rédacteur de l’acte qu’il assure l’efficacité de l’accord intervenue entre les parties.
Cabinet Maître Joan DRAY
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